Fred à terre

Adapté du livre "Le dernier rivage" de Nevil Shute, le film de Stanley Kramer suit plusieurs destins, survivants d'une guerre atomique planétaire qui semble n'avoir laissé qu'un seul rivage de l'Australie pour seule espace viable. On y découvre d'ailleurs brièvement une ville où le vélo et les chevaux ont repris leur droit. D'après les calculs, il ne reste plus que 5 mois avant que le nuage radioactif n'arrive pour en finir avec les derniers êtres humains et ce dernier paradis épargné. Un commandant de sous-marin va tenter avec son équipage une dernière escapade à la recherche d'un espoir fou.

On suit principalement trois relations amoureuses au crépuscule du monde. Gregory Peck, commandant du dernier sous-marin en activité a perdu ses deux enfants et sa femme pendant cette apocalypse brutal dont personne ne connaît le déclencheur (URSS ou USA ?). Accosté par nécessité sur ce dernier rivage, il rencontre une femme plus si jeune (séduisante Ava Gardner) à la réputation de mangeuse d'hommes. Un jeune militaire (Anthony Perkins) secondera bientôt le commandant et s'inquiète quant à lui pour sa fille et sa femme restées à terre. Celle-ci veut croire farouchement à un dernier espoir, lui est plus pragmatique et aimerait qu'elle le soit davantage. Pour finir, Fred Astaire vieillissant interprète un scientifique cynique qui a participé à l'élaboration de la bombe et se retrouve seul avec une dernière idée folle en tête pour enjoliver ces derniers jours, retaper un bolide et gagner la dernière course humaine de la planète. N'oublions pas que tout ce petit monde s'imbibe généreusement puisque le mieux avant la Fin, c'est de boire évidemment.

Autant dire que tout cela est très riche thématiquement.

En revanche, le film n'hésite pas à s'étaler sur plus de 2 heures pour mieux développer les relations amoureuses à l'orée de la fin de l'humanité et c'est tout de même assez morne, peu stressant et ça fait quand même un peu film de vieux hein (j'ai hésité mais si quand même :p). Mais, même s'il est un peu trop romantique, peu tendu et trop lent à mon goût et ce malgré son cynisme, il fait preuve d'atouts et d'une modernité dans ses thèmes qu'il est difficile de ne pas conseiller pour tout cinéphile fan de dystopie post-apocalyptique et de science-fiction.

Donc, dans ma tête ce serait 6, trop mielleux et mollasson, mais soyons clair, je ne peux pas ne pas mettre 7. Un film aussi singulier placé pile entre le romantisme 50's et la science fiction moderne à venir, en pleine guerre froide et qui traite de la fin du monde aussi directement, d'une ça ne court pas les rues, de deux sa proposition de dystopie est loin d'être désuète et son fatalisme mêlé de mélancolie tout sauf anecdotique, et de trois, Ava Gardner, Gregory Peck, Anthony Perkins et Fred Astaire quoi. Ils participent grandement au charme unique de cette exploration de l'âme humaine. En plus, c'est très correctement réalisé la grande majorité du temps et il y a pas mal de scènes philosophiquement fortes qui feront date dans le genre.

Mais personnellement, Gregory Peck ne me l'a pas du tout fait, mais alors du tout. C'est un bloc de granit au charisme de bâtonnet de colin dans ce film. J'avais envie de lui crier dessus, mais remue-toi ! change de tête un peu ! bouge ton corps man !

Bref, je vais mettre de côté ma déception immédiate pour conseiller ce film à tout fan de dystopie post-apocalyptique et de vieilleries charmantes parce que ça vaut quand même largement le coup. Mais, je préviens, c'est très lent, ce n'est pas du tout spectaculaire et à peine divertissant. Par contre les thèmes abordés sont eux intéressants, le cynisme ambiant remarquable pour l'époque et la réalisation ne manque pas de charme. Et la course de bagnoles complètement incongrue est proprement halllllucinante.