♪ Je vais t'aimer comme on ne t'a jamais aimée ♫

Tout commence comme une classique histoire d'amour passée aux philtres de couleurs pop. Puis l'histoire d'amour devient fulgurance. Tout y est : l'absence d'envie initiale, la rencontre inopinée, la personne que l'on a connue chenille et qui est devenue papillon.


Cependant, tant en images qu'en paroles, les warnings s'allument rapidement.


C'est la soeur de Blanche tout d'abord, qui lui rappelle sur le ton de la taquinerie qu'il suffit qu'on l'aime pour qu'elle aime. Ou quand la vérité glisse sur le ton de la plaisanterie.


C'est ensuite une évidence trop grosse du patronyme adopté par ce chevalier servant trop parfait : pensez donc, Lamoureux... Quoi de plus adapté aux premiers moments de la séduction d'une proie fragile ?


Et puis, il y a cette impression qui colle à la peau. Le truc qui cloche, impossible à qualifier, mais tenace, qui confine au malaise. La latence noire dans ses yeux, trouble, inquiétante que la caméra de Valérie Donzelli réussit à capter.


Pour Blanche, c'est dans les yeux de Grégoire que le long voyage vers la nuit prend sa source.


Les yeux de l'amour tout d'abord, pour ensuite lentement se transformer en des yeux inquisiteurs et jaloux.


Le thème n'est pas neuf, L'Enfer ayant déjà été décrit par Claude Chabrol il y a un bail, mais entre en résonance avec les combats de notre temps. Et Valérie Donzelli illustre plutôt bien l'enfermement mental subi par Blanche, son isolement, ainsi que toute la perversité de son bourreau, mi-lavette, mi-tyran, et sa capacité à faire de sa victime la coupable de ses propres agissements. Et de lui faire croire.


La description d'une telle relation toxique ne serait rien sans deux comédiens investis : Virginie Efira est parfaite, comme souvent, dans sa composition de femme qui tombe peu à peu dans un abîme ponctué d'une fugace parenthèse enchantée solaire, avant de totalement perdre pied.


Mais c'est bien Melvil Poupaud qui s'impose comme l'attraction de L'Amour et les Forêts, lui qui réussit à embrasser l'ambivalence du bourreau, son côté sombre latent qu'il retient le temps de la séduction de sa proie, sa violence qui se passe le plus longtemps possible des coups. Tel une araignée tissant patiemment sa toile soyeuse pour mieux abuser sa victime.


Si la narration de l'oeuvre en long flashback peut prêter à discussion en terme de tension, L'Amour et les Forêts est suffisamment bien charpenté et mis en images pour donner vie à un double puzzle psychologique mortifère. Et si l'on sait assez rapidement vers quoi tout cela nous emmène, on ne peut qu'être touché et révolté par l'intensité de ce cauchemar intime.


Behind_the_Mask, confession d'un homme dangereux.

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le 20 juin 2023

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