La Condition de l'homme 1 - Il n'y a pas de plus grand amour par ngc111
Un premier volet centré sur le choc d'un homme confronté à la dure réalité des divergences de vue, d'opinion et de méthode. Humaniste, traité de gauchiste, Kaji découvre bien malgré lui la difficulté de mettre en pratique ses idées sociologiques et politiques qui ne s'accordent pas avec celles mises en place par l'armée et les entreprises japonaises.
La transformation est lente, progressive mais éclatante ; Kaji arrive confiant, sûr de lui, il affronte ses opposants avec calme et lucidité afin de mettre en place un traitement plus équitable, juste et honnête des travailleurs, mais avec l'arrivée de prisonniers chinois, les choses se corsent et l'on voit petit à petit l'assurance du personnage principal s’effriter devant les échecs à répétition. Car malgré sa volonté farouche de convaincre les autres de sa loyauté et de sa détermination à les aider, Kaji comprend bien vite que cela ne suffit pas et que les prisonniers restent désireux de s'évader au plus vite pour échapper aux mauvais traitements et à l'injustice régnant dans le camp de travail. Il essaie tant bien que mal de s'opposer à tout cela, refrène même les ardeurs de son adjoint, et en vient presque à crier son intégrité à des chinois ayant inévitablement en horreur les japonais dans lesquels ils ne peuvent avoir confiance.
C'est là le stade final de la métamorphose de Kaji ; il se morfond et se met à douter de lui-même, se questionne, hésite sur le choix à faire. Peut-il arrêter l'exécution des prisonniers chinois injustement condamnés ?
Il délaisse sa vie de couple, la met en péril, tout part en lambeaux et se rend compte de son impuissance.
Car au-delà de toute considération sur le bien fondé de ses actes, sur la justesse de ses choix, il y a cette implacable réalité : Kaji est impuissant face aux méfaits de la guerre, du pouvoir et de la différence.
Kobayashi filme tout cela avec sobriété, prend son temps, mais jamais on ne lui en veut, il n'y a pas une minute de trop dans La Condition de l'homme ; chaque personnage est bien traité, le jeune japonais de mère chinoise tiraillé entre ses origines, l'épouse éperdument amoureuse qui découvre elle aussi sa part d'impuissance dans le destin du couple, les divers prisonniers chinois qui ne sont pas présentés comme une masse informe mais en tant qu'individus propres et uniques...
Au milieu de tant de beauté, d'intelligence et d'efficacité, c'est à peine si l'on remarque le côté démodé des scènes d'action (celle de l'exécution notamment), qui étalent trop grandement leur aspect factice. Mais après 40 ans d'évolution cinématographique cela est bien normal.
La Condition de l'homme : Il n'y a pas de plus grand amour est un chef d’œuvre à couper le souffle, aussi beau que le laissait supposer son titre aguicheur, qui respire la réflexion et propose une belle analyse sociologique, tant sur l'individu en général que sur un cas personnel. Brillant !
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