En choisissant de ne tourner que des œuvres appartenant à la mémoire populaire, Christophe Gans est un cas à part dans le cinéma français. Après avoir abordé la bête du Gévaudan avec un anachronique « Pacte des loups » et ses combats à la Matrix, puis sublimé visuellement le jeu « Silent Hill », le voici qu’il s’attaque à du lourd, « La belle et la bête ». Le Studio Disney, en son temps, avait déjà, pas mal écorné le célèbre conte le transformant en une espèce de sirupe glamour à deux balles. Seule l’inoubliable version de Jean Cocteau en 1946 peut se prévaloir d’être la plus sensible des adaptations, la plus poétique, mais également la plus fidèle. Entre onirisme et fable morale, le poète jouait alors sur du velours…
Gans, lui, a totalement loupé son coup. Se démarquant du conte traditionnel du XVIIIème siècle, il a lorgné sur les variantes antérieures où se mêlaient à l’histoire tout un bestiaire mythologique celtique (son armée de géants gris vaut son paquet de maïs !). Mais cela n’était sans doute pas suffisant car il s’inspire également et très largement de ses prédécesseurs piquant ici où là des idées, voire des scènes. Cocteau bien sur…, on pense aussi à Jacques Demy (les robes couleur de tout, bon ici elles sont à la limite du vulgaire), des éclairages burtonien (la scène du port proche de Sweeney Todd, la luxuriante ou agressive nature de Big fish…). Le tout formant une espèce de tout et n’importe quoi sans âme véritable, et desservi en plus par un mauvais casting. Seydoux est insipide comme à son habitude, Dussolier caricatural, Audrey Lamy en Zézette des faubourgs est ridicule et le pauvre Cassel, qui a perdu de sa classe naturelle se voit affublé d’un « masque » si laid que même une Farfouille ne voudrait pas vendre pour Mardi Gras.
J’aurai aimé aimer. Mais force est de reconnaître que Christophe Gans apparaît de plus en plus comme le Viollet Leduc du 7ème art. Par un mauvais mélange de genre, ses adaptations grandiloquentes et son univers plus gothique que le gothique ne desservent aucunement les œuvres qu’il retouche, exception faite peut-être pour Silent Hill.