La Belle et la Bête par Black_Snape

Je me dois de commencer cette critique en annonçant directement que je renie le projet de ce film depuis même qu'il a été annoncé. La Belle et la Bête, par Christophe Gans ? Quelle MAUVAISE blague !!
J'ai donc passé mon temps à ruminer ma haine et à pleurer du sang chaque fois que j'en découvrais une image. Léa Seydoux en Belle ? Sérieusement ? Léa Seydoux ? Qui ne sait pas jouer et qui respire par tous les pores l'arrogance ? Punaise, heureusement que Vincent Cassel est là pour rattraper un touuuuut petit peu le carnage, me dis-je.

Après un long travail psychologique, néanmoins, me voilà en route pour la salle obscure. J'ai mis de côté mon amour incommensurable pour Cocteau tout comme celui que je porte au Disney, je me suis dit "Tu vas voir un film familial. Laisse-lui sa chance" et je me suis installée, vierge de préjugés et pleine de bonne volonté. Enfin presque.
Le film commence, sur le ton du conte. Les acteurs jouent comme dans un dessin animé (les deux sœurs faisant étrangement penser à celles de Cendrillon). Je suis étonnement surprise par ce début qui fonctionne très bien à mes yeux, un peu comme un premier volet de Pirates des Caraïbes. Le film avance et nous découvrons le château de la Bête. Je suis abasourdie par la qualité des décors, le travail visuel qui se présente à mes yeux depuis le début de ce film. Par la musique aussi, qui fonctionne très bien et entraîne dans le merveilleux. Je trouve même que Seydoux s'en sort bien en conteuse.
Bref, j'entre très bien dans le film et j'en suis la première surprise. Il y a quelques petits hic, comme l'apparition de ces petites créatures chiens ou quelques répliques vraiment pas terribles, mais pas assez pour me faire dire que je déteste, comme ce devrait être le cas.

C'était sans compter sur le singulier talent de Gans : rater le traitement du sujet principal de son film. Attention, cette critique ne cachera rien des ressorts de l'histoire à partir de maintenant.
Belle entre véritablement en scène, et c'est la catastrophe... La jeune Belle, enfant modèle, se sacrifie pour sauver son père. C'est donc elle qui retourne au château de la Bête à sa place, non sans crier un merveilleux "N'oubliez pas de m'aimer !" avant de partir. Euh... sans déconner Christophe ? Son manque de talent n'est pas suffisant, tu as vraiment besoin de lui rajouter des répliques aussi POURRIES ?!
Là débute alors un régal plus grand pour les yeux, le château est merveilleux, la magie est présente, les costumes féériques. Gans a bien réussi son pari. Et puis, il nous balance une flèche d'or en plein cœur comme pour nous rappeler qu'on a eu tort d'y croire.
Qu'est-ce que c'est que ces scènes entre la Belle et la Bête ? Qu'est ce que c'est que cette Bête, déjà ? Qui, de 1, ne fait pas peur, et de 2, n'impressionne PERSONNE tant elle est constituée de vide intersidéral ! La Bête ne fait que pleurnicher sur son sort après avoir sorti une vieille réplique moisie censée être intimidante ! C'est affligeant. Elle passe son temps à se faire insulter par cette pimbêche de Belle, sans jamais rien dire d'autre que "oui, mais bon, quand même, tu penses que tu pourrais m'aimer ?" d'une voix lamentablement pleurnicheuse.
Qu'on m'explique déjà ce qu'il lui trouve, à cette Belle qui, au-delà d'être bonne, en effet, est insupportable ! C'est ça, Belle ? Une fille arrogante, une pisseuse qui balance vilenie sur vilenie à un "tortionnaire" qu'elle ne craint pas une seconde et qui surtout, se laisse faire de A jusqu'à Z ? Hé ho ! Tu as vraiment cru que tes spectateurs allaient pouvoir y croire une seconde ? (Que les acteurs y croient, déjà, reste un mystère pour moi)
Leurs (trois) scènes de dialogues sont nulles, mal écrites et mal jouées. Aucune relation cohérente ne s'établit entre les deux personnages, aucun feeling ne passe. Tout est plat, et mauvais. Et puis soudain, alors qu'une scène de danse vient ramener un peu de magie, Belle finit en déblatérant nombres de remarques insultantes envers la Bête "jamais je ne t'aimerai, tu me dégoutes" staïle. Et la Bête de partir la queue entre les jambes...
Enchainement sur une scène lors de laquelle Belle suit la Bête (pourquoi ?) et se retrouve effrayée car elle voit la Bête manger (comme une bête, forcément) Résultat, elle s'enfuit. La Bête la rattrape et là, incompréhension totale : les deux manquent de s'embrasser. Mais WHAAAT ? Ça sort d'où, ça exactement ? Ils ne font que s'envoyer sur les roses et tout à coup, ils veulent s'embrasser ? Combien de scènes ont été coupées exactement ? Non mais, qu'on m'explique...

A partir de là, on perd définitivement tout espoir de voir une quelconque logique dans cette relation, ou même une quelconque alchimie entre les deux personnages. A partir de là, tout dans le récit devient incohérent, mal raconté, mal joué. On sombre dans le grand spectacle en oubliant que si les effets spéciaux, c'est cool, il faut de l'émotion pour que ça prenne. On ne vibre pour personne, on se moque de la connerie des personnages, et on nous assassine de plans de mecs à cheval. C'est bien, Christophe, on avait déjà compris que tu aimais les chevaux, mais alors va faire des tournages pour les courses PMU et laisse nous tranquilles ! Le summum de la scène ratée revient à celle de la "nymphe des bois" (déjà, trouve une bonne actrice pour faire passer ces dialogues). La flèche plantée dans le sein de la femme, qui est obligée de la tenir de manière ridicule pour ne pas choquer les petits enfants, reste je pense "mon moment préféré". Non, non, je dis non. C'est trop. C'est trop et pourtant ce n'est pas encore fini...

Mais là n'est pas le propos de ma critique. Non, mon propos est le suivant : Gans a su créer un univers merveilleux, qui fonctionne à la perfection. Amoureuse du Disney, je me suis laissée piéger par l'ambiance, par la beauté des effets visuels, par la magie de la musique. Il a même trouvé de très bonnes idées, comme l'histoire de l'envoutement de Belle par les rêves qu'elle fait sur le passé de la Bête. Rêves qui auraient pu expliquer pourquoi elle tombait amoureuse de lui, d'ailleurs. Mais non. Non, il s'agit simplement d'une bribe d'idée qui ne tient pas debout. Lassante, même, au bout de trois flashback dans le passé de la Bête. Et c'est malheureusement le cas pour tout ce qui est censé constituer le fond de ce film.
L'histoire que conte Belle contredit ce qu'on nous montre. Les coupures se sentent, sont si brutales qu'elles rendent l'évolution des événements parfaitement incompréhensible. Plus le film avance et plus les acteurs ont de mauvaises scènes et de mauvaises répliques. Et plus les scènes nous laissent indifférents tant la platitude des personnages nous laisse de marbre face aux "dangers" qui les guettent. Plus les scènes sont ridicules, également. Comment on ose aujourd'hui faire une scène comme celle des ronces ? Belle qui abandonne son cheval pour foncer tête baissée dans un parterre de ronces, désespérée, prête à tout donner pour rejoindre celui qu'elle aime (même si on ne sait toujours pas pourquoi) et qui s'écroule à bout de force en priant le Dieu des Bois de l'aider. Tout ça pour qu'on découvre son cheval à 10 mètres derrière elle une fois que les ronces s'écartent. En fait, tu voulais la faire vraiment stupide et risible, ton héroïne, c'est ça ? Tu voulais montrer que ça t'emmerdait, que Jérôme t'ait imposé Léa en échange de tes 33 millions de budget ? Bah bravo, ça au moins, c'est bien réussi !

Bref, je ne comprends pas comment on peut rater le propos même de son film. Je ne comprends pas comment on donne 33 millions d'euros à un réalisateur incapable de raconter. Je ne comprends pas comment on peut saboter ce qu'il y avait de plus simple et de capital à représenter dans cette histoire, à savoir la relation entre la Belle et la Bête. Plus je pense à ce film, et plus je me demande s'ils en faisaient vraiment partie, tant ils sont insignifiants. C'est quand même le titre de ton histoire, bon sang !

Pendant une demi heure, j'y ai vraiment cru. J'ai vraiment pensé qu'il saurait en faire quelque chose d'intéressant, et puis pouf... je suis tombée dans un puis sans fond. C'est dommage pour toi, Christophe, tu avais pourtant réussi à rendre le film exportable dans le monde. Si seulement tu avais su mettre en scène...

Ce film est du gâchis, et je suis d'autant plus triste de le constater que, moi qui suit partie avec tant de préjugés, ai réussi à m'en débarrasser avec tant d'aisance tant l'ambiance de ce film fonctionne à merveille. Ce film aurait pu être un très beau conte, mais pour ça, il aurait fallu du talent pour savoir conter.

https://lecabinetdemomone.wordpress.com/