Ce premier western réalisé par Clint Eastwood peut laisser perplexe et nécessite d'être revu pour être pleinement apprécié. Avec son ambiance sombre, onirique, quasi-surréaliste et très sombre, ses plans audacieux, ses emprunts, ses pastiches et ses recréations, on comprend vite qu'Eastwood est aussi ambitieux que doué. Le choix du sujet est, par ailleurs, particulier. Sur le thème classique de la vengeance, son traitement à la limite du fantastique (ce qui est vraiment le cas dans la version originale) met en avant des personnages au caractère excessif.
La lâcheté des villageois est telle qu’on laisse à l’étranger faire tout et n’importe quoi jusqu’à la plus profonde des humiliations. Cette histoire de vengeance (forcément meurtrière) et d’humiliation dans un climat crépusculaire fait toute l’originalité de ce film inclassable qui ne ressemble que de façon lointaine à un western. Et son personnage principal laconique, pervers à bien des égards et violent, qui inspire une crainte étrange à tous ceux qui l’entourent, façonne un « type » qui dépasse les anti-héros des « westerns spaghettis ».
Curieusement, l’ambition artistique se heurte parfois ici au genre qu’elle entend enrichir. Car si le film ne manque pas d’atouts (réalisation, interprétation), il pèche par un scénario parfois trop démonstratif. Loin du « western d’action », très proche du western italien dont il ne cherche pas à s'affranchir, Eastwood semble ici se faire la main. Il est cependant regrettable que l’ensemble manque de tension et de rebondissements. D’où cette sensation inévitable de se trouver face à un film étrange, posé entre le film d’auteur et le film de genre. On peut aussi bien comprendre l’enthousiasme qu’il suscite auprès de certains que les réserves qu’il peut soulever. En tout cas, il ne peut laisser indifférent, marque de sa réussite.