L'Apprenti
6.3
L'Apprenti

Documentaire de Samuel Collardey (2008)

Prenez une pincée de La Vie moderne pour l’approche du monde paysan de moyenne montagne – ici les plateaux du Haut Doubs – ajoutez ici un soupçon de Entre les murs pour l’univers scolaire et l’apprentissage – filière agricole – et terminez avec un saupoudrage de La Vie de Jésus pour le traitement naturaliste et brut des personnages – également interprétés par des comédiens non professionnels et vous aurez une bonne idée de ce qu’est L’Apprenti.

Depardon, Cantet et Dumont, on a vu pire comme références pour un premier film. Celui signé par Samuel Collardey, qui d’ailleurs s’est vu décerner le Prix de la Semaine de la Critique à la dernière Mostra de Venise, les soutient sans hésitation. Récompense justifiée tant ce long-métrage révèle le regard acéré et empathique d’un cinéaste qui choisit de se coltiner au réel par l’intermédiaire d’une fiction épurée dont les deux principaux ressorts n’apparaîtront qu’assez tardivement dans la narration.
Samuel Collardey suit donc Mathieu, élève dans un lycée agricole et en apprentissage chez Paul, éleveur de vaches laitières dans une ferme isolée. Filmé tour à tour en classe, dans la ferme de Paul, avec ses copains ou chez sa mère, Mathieu n’est guère épargné par le réalisateur qui le malmène, le place dans des situations périlleuses (chantant à tue-tête au cul des vaches) qui pourtant ne sombrent jamais dans le ridicule. Outre l’apprentissage des techniques agricoles – pour lesquelles Mathieu ne semble avoir que peu d’intérêt – c’est à celui de la vie, des contraintes liées au respect d’ordres et d’instructions que le jeune lycéen est directement confronté dans sa relation avec Paul, paysan plein de bon sens, très attentif à son indépendance et son temps libre, l’état général de son exploitation dut-il s’en ressentir.

L’Apprenti se compose de séquences courtes alternant intérieur et extérieur, moments graves et d’autres plus légers – les scènes de beuverie, de fête avec les copains étant pour les moins convaincantes du film. A l’inverse, là où Samuel Collardey fait mouche, c’est dans sa captation sensorielle de la campagne jurassienne au gré des saisons. Dès lors, L’Apprenti porte bel et bien l’empreinte du cinéma, grâce à ses mouvements de caméra, ses longs travellings et le soin particulier apporté à la lumière.
En dépit de quelques imperfections – la situation des parents de Mathieu paraissant trop appuyée ; des problèmes de rythme – L’Apprenti demeure néanmoins une première œuvre très attachante. D’abord parce qu’elle filme des gens et un environnement auxquels le cinéma français ne nous a guère habitués, ensuite parce qu’elle offre à ceux-là mêmes un cadre justement dimensionné, à la fois accessible et élégiaque, que l’emploi du 35mm magnifie.
PatrickBraganti
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le 10 janv. 2013

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