Nadir Moknèche a plusieurs fois prouvé sa capacité à garder toute sa substance au sujet qu'il choisit, en évitant les chausse-trappes de la facilité et les miasmes du pathos. En témoignent notamment Le Harem de Madame Osmane, Viva Laldjérie et Délice Paloma. Avec L'air de la mer rend libre, titre poétique qui ne prend sa véritable signification qu'en toute fin de film, le cinéaste franco-algérien nous invite à un mariage arrangé, lequel arrange aussi le couple en question, pour des motifs différents : lui, pour dissimuler son homosexualité ; elle, pour faire oublier son passage par la case prison. C'est donc à un film de famille, car celles des susnommés a son mot à dire, auquel nous avons affaire, et le réalisateur y met à infuser une bonne dose d'ironie et d'humour, un vrai regard moderne sur la vie avec ses proches, qui n'est que rarement un long fleuve tranquille. Ce qui est marquant dans la facture très agréable du film, c'est sa fluidité constante, avec des scènes courtes et souvent très drôles, qui par petites touches tracent des portraits de personnages plus ou moins emberlificotés dans les traditions et la réputation. Ce qui se joue là, c'est la liberté de chacun à tenter de passer une existence débarrassée de tous préjugés et d'opinions extérieures, ce qui n'a jamais été simple, chacun en conviendra. La vision malicieuse de Nadir Moknèche rend la chose sinon légère du moins plaisamment moqueuse, avec une bienveillance qui n'empêche pas un peu de mordant.