La trajectoire du Joker de Todd Philipps pourrait facilement se lier avec celle de Peter Farrelly. Tous deux réalisateurs de comédies, ils se sont tous deux trouvés en un seul film propulsés vers les plus hautes récompenses. Si pour ce dernier Green Book, l'a emmené jusqu'à l'Oscar suprême, Philipps et son Joker, repartis avec le Lion d'Or à la Mostra de Venise et sa réputation dithyrambique, semblent également partir en favoris.
Sauf que si Joker semble réellement habité par quelqu'un, cela ne semble pas être Todd Philipps mais bel et bien par son acteur principal Joaquin Phoenix. Ce dernier, réellement possédé et amaigri, fait de son corps tout entier l'instrument de cette folie qui se tord et encaisse les maux d'une violence qui gronde.
L'acteur arrive a transmettre cette douleur au spectateur qui frappe à l'apparition de ce corps à moitié nu, habillé par les notes d'un rire qui résonne comme un cri, qui frappe et retentit. De son regard perdu, Phoenix porte véritablement le film sur ses maigres et impressionnantes épaules. L'habillage du film, quand à lui, semble être trop grand pour le réalisateur.
Si ce dernier à voulu s'approprier (en convoquant en plus Robert De Niro) deux grands films d'un certain Martin Scorsese (décidément au cœur de l'actu en ce moment avec son The Irishman bientôt sur Netflix) , ce n'est que pour en livrer un côté auteuriste parfois superficiel. The King of Comedy et Taxi Driver étant des habits trop grands pour lui, Todd Philipps surligne et étale l'insolent génie des deux chefs d’œuvres dont il s'inspire. La répétition a remplacé l'intelligence discrète, qui malgré quelques plans vraiment iconiques, n'arrivent jamais à se hisser que comme un film empli de ces grandes références.
Car le personnage emblématique de DC, lui a trouvé un écrin digne de son mythe. En prenant lieu dans un paysage qui lui sied parfaitement , l'intelligence de l'entreprise et la performance de son acteur, le Joker résonne et prend intelligemment la tête d'un projet à contre-emploi des projets supers-héroïques actuels. Épousant parfaitement l'univers dans lequel il est né dans les pages de comics, l'antagoniste emblématique de Batman fait résonner son cri de douleur de la plus belle des manières.
Finalement, si Philipps n'a pas vraiment gagné ses galons d'auteur, il livre un véhicule doré au personnage et à son acteur. Et ce n'est finalement pas si mal. C'est même très bien.