Un connard de hippie blanc en liberté

Sur Into the Wild, je risque d'être méchant.


Non, en fait, je vais être dur.
Parce que j'assume totalement.


C'est autant le film que ce qu'en font les admirateurs de ce film qui m'insupporte.


Que montre Into the Wild ?


Un individu seul qui ne se sent plus d'exister parmi les siens. Alors il laisse sa famille dans l'incompréhension et il se casse. Tout son parcours est le fruit d'une petite-bourgeoisie qui, mue par un fascisme individuel et un mysticisme pélerin, se permet de "sortir du système"... "pour vivre autrement"... "ne plus subir les diktats"... "l'aliénation"...


Renonçant à l'amour et à la transmission,
Préférant les usages de l'ego transcendé par la nature,
Mort par ignorance,
C'est un film, ce n'est plus qu'un film sur un petit dictateur sans peuple.


Depuis quand refuser tout dialogue est-il un acte de bravoure ? Depuis quand le renoncement est-il devenu une force, une couille et un bras d'honneur ?


Et des gens pour le trouver courageux, ce McCandless, il y en a. Beaucoup.
Pour moi, ce héro est complètement con, immature et égoïste. Qu'on soit contre ou pour ce qu'il fait, il est con. Infiniment plus con que la nature n'est elle-même infinie. Qu'on soit pour ou contre, il est en réaction. Il est individualiste. Je n'avais nul besoin d'un film pour savoir que la vie est injuste... Non mais c'est quoi cette mentalité ?!
C'est vraiment un film pourri jusqu'à la racine.


Je n'aime pas non plus Carnet de Voyage mais au moins on sait ce qu'est devenu le Che par la suite (quoi qu'on puisse dire de son engagement). Il y a une nette différence entre ces deux fugues. Même 127 heures de Boyle a la décence d'être plus lucide que ce personnage béatifié, momifié.


On peut me dire que je politise de trop mais entre l'une et l'autre vision, il y a une frontière ; il y a deux conceptions pour un seul idéalisme. Et quel idéalisme ! Into the wild permet d'observer une résignation totale et une fuite en avant perpétuelle comme s'il s'agissait d'un exemple à suivre et j'insiste à souligner que Penn en fait un exemple romantique.


Qu'on essaie pas de me dire que Penn ne juge jamais en bien comme en mal son personnage. Il ne lui aurait pas donné une si belle forme ni une si belle foi à ce personnage sinon. Je ne parlerai pas - causant de foi - de l'essentialisme de notre "héros vertueux", et pourtant c'est très important de considérer cet embrigadement superstitieux.


S'il existe derrière ce visage une critique terrible de la société, cette critique ne donne vue sur aucun objectif viable en soi comme en finalité. Ma critique d'Into the wild est sacrément méchante, je le concède. Mais je réagissais au fait que même parmi mes amis, ce film fait sens et que pour eux, s'enfuir de "la société" - alors que fondamentalement on n'en sort pas, même pour explorer des lignes de fuite comme dirait Deleuze. Cette fuite, cet évitement est perçue comme une possibilité et je vois bien qu'ils sont prêt à se battre pour cette possibilité, tout ça au lieu de se battre maintenant, dans leur classe sociale, avec leurs conditions, avec le présent. Et ce film est tout à fait symptomatique du dégoût individuel et caricatural pour la société mais où l'individu réside dans un espace et dans des conditions suffisamment riches pour se permettre de fuir, même en entretenant cette illusion collectivement.


Par conséquent, je pousse même le vice à vous détourner de ce film misérable, je vous pousse à regarder son exact contraire : "Joe Hill" http://www.senscritique.com/film/Joe_Hill/389024




BONUS : "Un hippie fait le tour du monde pour apprendre à se connaître, il découvre qu'il n'est qu'une grosse merde"
http://www.fier-panda.fr/article/hippie-de-merde

Créée

le 27 janv. 2014

Modifiée

le 3 févr. 2014

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Andy Capet

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