Et pour ce soir :


Insomnia, 2002, de Christopher Nolan, avec les brillants (et le fort regretté) Robin Williams et Al Pacino dans les rôles respectifs de Walter Finch et Will Dormer.


Synopsis brumeux : Le détective Will Dormer (Ce nom est parfaitement adapté pour la suite) et son collègue Hap Eckart sont envoyé en Alaska pour une affaire de meurtre d'une gamine de 17 ans. L'enquête n'a rien de fou, mais en réalité, la police des polices enquête sur Dormer et ses enquêtes précédentes, et c'est sa façon de le mettre hors de son lieu de travail habituel, le temps de l'enquête. Situé au dessus du cercle polaire, le lieu connait ses jours polaires où le soleil ne se couche pas. Cet excès lumineux empêche Will de dormir et lorsqu'il sont sur le point de choper le tueur, la brume autour des lieux et sa fatigue fait qu'il tire et abat son collègue accidentellement. Cachant sa culpabilité, il finit par recevoir un appel d'un homme qui dit avoir vu la scène se produire. Le même homme qu'ils traquaient. Et qui lui propose un deal où chacun protège l'autre...


Pseudo cycle des Nolan, il ne m'en reste guère que je n'ai pas vu de lui, hors ce fameux Insomnia qui est dans ma bibliothèque de Blu-ray depuis bien une année et demi. Du coup, ne trouvant pas le sommeil (après avoir dormi 3h l'après-midi, ceci explique cela), j'ai trouvé assez logique de tenter son visionnage. Et étrangement, je partais avec un mauvais à-priori qu'il m'est difficile d'expliquer pour ce Insomnia. Les échos que j'avais parlaient d'un film mineur de Nolan, plutôt terne et pas bien passionnant. Alors il fallait quand même que je vérifie ces on-dits...


Bah franchement, c'était vraiment pas mal. Je peux comprendre pourquoi il est considéré comme mineur, à la lumière (vous l'avez ?) de ces 3 dernières productions, ou même du Prestige, voire même du film qui précède Insomnia, à savoir Memento. Cependant, personnellement, j'ai préféré ce Insomnia à Memento, parce que passé outre sa construction qui peut marcher la première fois, le film est finalement peu exceptionnel (Ne me faite pas dire ce que je n'ai pas dis, Memento n'est pas du tout un mauvais film pour autant). Insomnia est, quant à lui, plus "classique" dans sa construction mais il a plusieurs qualités très plaisantes.


La première est naturellement sa distribution. Al Pacino est nickel, comme à chaque fois qu'il joue un flic (un registre qui lui colle à la peau, vu ses rôles dans Heat ou Serpico...), Hillary Swank toute mignonne et talentueuse juste avant d'exploser une deuxième fois avec Million Dollar Baby (La première fois étant son oscar pour Boys Don't Cry). Mais surtout, et je l'attendais tellement, Robin Williams, tellement regretté dans son rôle très franchement à contre-emploi. Et quand je pense à quelle point cet homme était si talentueux autant dans ses rôles de comiques que ses rôles dramatiques (Le Cercle des Poètes Disparus à jamais dans mon coeur), il reste difficile de ne pas ressentir un pincement au coeur en le voyant, surtout à la fin du film. Ici, il joue finalement un tueur assez ambigu qui me donnait l'impression de ne pas être si psychopathe que les flics le décrivent.


Deuxième qualité, les décors. Nolan a toujours du flair quand il s'agit de montrer de somptueux décors. Toute cette zone de l'Alaska (filmé en Colombie Britannique en réalité) est absolument magnifique, avec ces plans en hélicos le long des routes. Il est par ailleurs aidé par un super chef op' (qui devrait rester chef op' d'ailleurs...), Wally Pfister, qui utilise parfaitement bien la lumière du jour pour créer le décalage très particulier qu'induit l'absent de nuit dans le récit.


Troisième qualité que je trouve brillante dans le récit : sa gestion du temps. Tout le film se déroule de jour, la lumière est toujours présente vu que le cycle jour-nuit n'existe pas. Je lisais dans les bonus du film que Wally Pfister considère que la lumière est un personnage à part entière du récit, ce qui a du sens vu qu'il est le moteur de tous les problèmes de Dormer. Il est très intéressant de remarquer que le film ne donne jamais de repère temporel hors de l'hôtel avec son réveil, et il est donc, comme pour Will, impossible de savoir si on est le jour ou la nuit. Déstabilisant au début, mais finalement très efficace dans le récit. Certaines scènes comme celle où Will déambule dans un boulevard vide parviennent à créer un vrai sentiment de malaise et d'isolement.


Enfin, j'aime beaucoup le traitement que le film propose sur la progressive privation de sommeil et les dégâts sensoriels que cela provoque. Chacun n'a pas les mêmes effets. Pour ma part, j'ai tendance à avoir des hallucinations auditives quand je suis en privation de sommeil, mais le film montre surtout des flashs d'images qui augmente au fur et à mesure du récit. Le visage de Will est constamment fatigué et sa voix prend progressivement la même direction. Pour nuancer ce dernier point, je trouve cependant dommage que ce n'est que dans le dernier acte du film que les conséquences de ce manque de sommeil sont le plus marqué pour lui, ça fait un peu grosse facilité scénaristique.


D'ailleurs, dernier truc qui me dérange, sa fin. Alors, dès que le personnage de Robin Williams est présenté, j'ai été sûr de savoir comment le film allait se terminer, en espérant sincèrement qu'il prendrait une autre direction plus ambigu. Et malheureusement pour moi, le film s'est terminé exactement comme je l'ai prévu. A l'origine, Insomnia est un remake d'un film norvégien de 97 (les mecs ont tenus seulement 5 ans avant d'en faire un remake...) qui a une fin un peu différente, plus ambigu, mais pas encore autant que je l'aurai aimé. C'est con, mais je trouve que l'on manque de film qui ose se finir d'une façon plus noire que celle-là. Je reconnais que c'est un défaut qui ne mérite pas de plomber le tableau de façon un peu plus objective pour le film mais il n'empêche que j'en suis sorti un peu déçu.


Pour autant, le film reste solide. Il me laisse plein d'images et d'idées en tête et, en règle général, c'est le genre de trucs qui me fait penser que le film a réussi quelque chose. 7/10

Tony_Gendron
7
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le 14 mars 2020

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Tony Gendron

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