Empire likes back
Aborder l’Empire intérieur exige du spectateur de nombreuses qualités, et poussées à un extrême auquel il n’est pas coutumier : patience, endurance, lâcher prise, tolérance, voire indulgence seront...
le 11 juin 2017
71 j'aime
3
Avant hier soir, je n'avais encore jamais vu Inland Empire, le dernier film en date (2006) de David Lynch. On attend encore au jour d'aujourd'hui son prochain vrai film au cinéma, en espérant qu'Inland Empire ne soit pas son tout dernier film. C'est un film que j'avais raté à sa sortie, parce qu'il m'intimidait beaucoup et en effet c'est un film intimidant. Je dois d'ailleurs dire, que je ne sais même pas comment en parler, tellement c'est impossible d'en résumer le pitch. Même 24 heures après l'avoir vu et à tête reposée, je n'y vois pas beaucoup plus clair, mais je vais faire de mon mieux pour vous donner envie de le découvrir à votre tour.
Le film dure trois heures et c'est quelque chose qu'il faut avoir en tête pendant le visionnage. C’est l’un de ces films de plus de trois heures, où les choses sérieuses ne commencent qu'au bout de une heure ou une heure trente. David Lynch prend son temps pour vous présenter son univers si étrange et vous ne vous sentirez "à l'aise" (si puis-je le dire ainsi) qu'après une heure et demie de film. Alors ça ne me dérange pas de regarder un film où le réalisateur refuse de me tenir la main et me laisse me forger mon propre avis, mais essayer de donner du sens à tout ça, c'est comme se promener dans la forêt avec un bandeau sur les yeux. Le cinéma de David Lynch, c'est comme une rose ... ça se sent, ça ne s'explique pas (Dixit Toulouse-Lautrec ou à quelque chose près).
L’impénétrable Inland Empire de David Lynch ... si vous me demandiez de quoi ça parle, je ne saurai quoi vous dire. Déjà de base, le cinéma de David Lynch n'est pas facile à aborder, mais alors là il fait très fort ... c'est très certainement son film plus obscure et énigmatique. C'est le film le plus expérimental de David Lynch depuis Eraserhead. Ne cherchez pas à tout analyser, à tout comprendre, il n'y a pas de vraie histoire à proprement parler. Le film est plus un véhicule à émotions et sensations, qu'autre chose.
Inland Empire est un condensé du cinéma de son auteur, on y retrouve des tas de plans repris de ses œuvres antérieures. Le film regorge de ces moments, lorsque la caméra se rapproche lentement à l'angle d'un long couloir sombre, où quelque chose d’horrible peut vous attendre. Il y a aussi beaucoup de scènes avec des dialogues énigmatiques, de scènes tendues et sombres avec une musique étrange. Si vous pensez à la scène du restaurant dans Mulholland Drive, vous savez où je veux en venir ... https://www.youtube.com/watch?v=UozhOo0Dt4o&ab_channel=Gogol
Maintenant que j’y pense, le film me rappelle beaucoup Mulholland Drive dans sa vision d'Hollywood, un Hollywood cauchemardesque ... mais la comparaison s'arrête là, Inland Empire est juste un joli exercice de style, tandis que Mulholland Drive est un pur chef-d'œuvre absolu.
Laura Dern semble jouer au moins trois ou quatre rôles différents dans ce film et même lorsqu'elle interprète le même rôle, les différentes temporalités changent complètement son interprétation. Sa silhouette élégante et son aisance devant la caméra impressionne et sa panoplie de jeu est tout simplement stupéfiante, pouvant se montrer à la fois inquiétante, sexy et hystérique. Quant à Justin Theroux, il semble reprendre son personnage dans Mulholland Drive, celui d'un acteur félin, arrogant et intimidant. On y retrouve également tous les habitués de longue date de David Lynch, à commencer par Grace Zabriskie (impressionnante dans la scène d'ouverture du film), Harry Dean Stanton, Ian Abercrombie, ainsi qu'un petit caméo vers la fin de Laura Harring.
Il y a eu de jolis moments surréalistes dans Inland Empire. Ainsi, il y a tout un jeu sur la distorsion temporelle, une boucle temporelle similaire à celle vue dans Lost Highway, lorsque Bill Pullman se répondait lui-même sur son interphone ... https://www.youtube.com/watch?v=yWTOpmDINPI&ab_channel=UrineBubbles
Et puis il y a la famille de lapins, les visites aléatoires en Pologne, les numéros de danse, les tournevis ... et la BO d’Angelo Badalamenti tout autant surréaliste (et superbe comme toujours).
Qu'on se le dise, j’adore David Lynch. J’aime presque (à une ou deux exceptions près) tous ses films, mais en toute honnêteté, Inland Empire ce n’est pas un film que je meurs d’envie de revoir de si tôt. J'aimerais vous dire que j’ai adoré Inland Empire, mais ce serait me mentir à moi-même. Même pour un film de David Lynch, c'est d'une bizarrerie inégalée. C’est plus bizarre que tout ses autres films réunis. J’apprécie l’homme, j'apprécie le cinéaste et j’apprécie que son cinéma ne ressemble à rien d'autre, mais là c'est à la limite de la frustration.
Pour conclure, je dirais que j’ai beaucoup aimé l'expérience Inland Empire, même si j'ai l'impression de n'avoir compris pas grand chose finalement. Je ne sais pas s'il y a un sens à trouver dans tout ça, ni un semblant de fil conducteur. J'imagine bien que David Lynch essaie de faire passer un message, mais manifestement je ne l'ai pas saisi. C’est pourquoi je suis légèrement resté en dehors du film et pourquoi je ne me suis pas senti totalement impliqué émotionnellement.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films de David Lynch, Les meilleurs films des années 2000, Les meilleurs films étranges, Les films à voir quand on est fatigué et Les meilleurs films de plus de trois heures
Créée
le 6 nov. 2022
Critique lue 109 fois
12 j'aime
9 commentaires
D'autres avis sur Inland Empire
Aborder l’Empire intérieur exige du spectateur de nombreuses qualités, et poussées à un extrême auquel il n’est pas coutumier : patience, endurance, lâcher prise, tolérance, voire indulgence seront...
le 11 juin 2017
71 j'aime
3
Inland Empire, représente l’apogée du travail de Lynch, d’un point de vue de la réflexion de l’âme, de la description du jeu permanent entre le réel et le subconscient, et bien d’autres thématiques...
Par
le 3 août 2014
53 j'aime
14
Sur l'échelle des valeurs 5 semble être la meilleure note. Si l'on regarde alors le motif on s'aperçoit qu'il y a autant d'étoiles jaunes que d'étoiles vides. Le barème devient donc une curseur de...
Par
le 20 déc. 2010
39 j'aime
3
Du même critique
Tout d'abord, je précise que j'aime Kaamelott dans son intégralité et que par conséquent, j'adhère totalement à l'évolution de la série et à son changement de ton entre les quatre premiers livres,...
Par
le 22 juil. 2021
38 j'aime
28
Le cercle rouge est le douzième et avant dernier film de JP Melville et c'est un film que beaucoup considèrent encore aujourd'hui comme son chef d'œuvre absolu. C'est aussi un film qui a marqué les...
Par
le 15 août 2021
37 j'aime
19
Les Bonnes étoiles est le dernier film de Hirokazu Koreeda, un drame social touchant qui repose beaucoup sur son ambiance très soignée et sur un casting vraiment très bon, en premier lieu Song...
Par
le 12 déc. 2022
35 j'aime
2