Probablement le volet le moins connu et peut-être aussi le moins rediffusé des deux "trilogies" de Sergio Leone, Il était une fois la Révolution a aussi la spécificité de ne pas avoir de grande star à l'affiche...


Rod Steiger et James Coburn ne sont bien évidemment pas des inconnus, mais quand même, c'est pas le même calibre... Quoi qu'il en soit, ce choix risqué ne pose aucun problème, le premier apportant son physique bonhomme et vicelard et le second son charisme indéniable comme sa roublardise. Cet épisode se voudra plus humoristique, et on ne fera pas qu'en rester aux intentions ! Le film enchaînant les scènes cocasses et malines, après d'autres plus âpres, tragiques, voire même poétiques.


Déjà, Il était une fois la Révolution s'ouvre sur la pisse de Juan arrosant un arbre. Le va-nu-pieds supplie peu après une diligence de passage de l'emmener parmi ses occupants, soi-disant pour se rendre au chevet de sa mère, jusqu'à ce que ceux-ci finissent par accepter ; mais surtout pour le ridiculiser et embêter la grande bourgeoisie déjeunant dans cette luxueuse voiture. Une scène d'ouverture assez formidable où l'on subira ces détestables nantis le traitant de noms d'oiseaux et s'empiffrant sous ses yeux. Les gros plans du réalisateur particulièrement appuyés sur leurs bouches débordantes finissant comme souhaité par nous écoeurer au côté de celui qui saura se venger... A l'image de cette autre scène avec la señorita, aussi belle (le sol circulaire de pierres) que dérangeante.


Plus tard, derrière un nuage de poussière, un rebondissement des plus inattendus viendra bouleverser l'idée même de l'époque à laquelle nous nous trouvions. Du pur génie de décalage. Surtout que le "grand sorcier" John, prêtre dynamiteur à l'eau bénite en sortant, en imposera et pas qu'un peu. Un peu plus en tout cas que cette incrustation "bancaire", elle aussi décalée, mais que je n'ai pas vraiment trouvée à sa place, pour être honnête. Aussi, le premier flash-back au sujet de la jeunesse de l'irlandais moustachu a un peu de mal à passer la première fois, mais son dénouement sera si beau (avec un sacré morceau d'Ennio Morricone en sus), et inattendu (ou presque), qu'au final je ne lui en tiendrai pas rigueur.


Et la révolution dans tout ça ? Une sacrée histoire ! Un groupe de révolutionnaires mexicains, dirigé par une pas si vieille connaissance (joli coup une fois de plus), prépare une petite intervention à Mesa Verde ; la ville où se trouve la banque tant convoitée par Juan. Les premiers plans de cette ville, combinés à de magnifiques notes de musique, et l'exécution sous les yeux de papier du tyran local, me feront frissonner. Et ce qui arrivera dans cette "banque", montrera une fois de plus la roublardise du scénario. Un type d'émotion que l'on retrouvera ensuite face au pont et à sa destinée presque visuellement poétique, après avoir apprécié la bonne humeur canardeuse des deux hommes commençant à se rapprocher - en tout bien tout honneur, vous croyiez quoi ? ^^ - succédant à une entame relationnelle plus que mouvementée. Mais finalement, tuer des gens, ça fait mal...


Parce qu'effectivement, il y a aussi beaucoup d'humanisme dans ce western. Il faut voir au cours de deux scènes la caméra de Sergio Leone s'attarder sur le visage de chacun des protagonistes, qu'ils soient morts ou vifs, avec une maîtrise bouleversante. Derrière chaque révolutionnaire il y a un homme, ou une femme, ou même un enfant... On n'est pas des numéros, bordel ! Surtout lorsque suivront ces exécutions de masse à vous glacer le sang ! Parce que le film a beau régulièrement jouer la carte de la comédie ; à cet instant précis, et au-dessus de ces fosses à fusillades, on n'a plus du tout envie de rire. Juste de s'enfuir de ce pays de fous, avec nos deux anti-héros partis rejoindre le Far West américain.


Enfin, Il était une fois la révolution se conclura sur des histoires de trains, d'amitiés, de vengeances et d'états d'âmes, qui se succèderont avec tragédie et maestria. Et l'on ressort de ce western bien conscient d'avoir encore assisté à un chef-d'oeuvre - ou presque - du pape du genre, ne souffrant selon moi que de quelques petites longueurs et micro fautes de goût.


Une grande comédie dramatique de western, politique et intelligente.

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le 4 mai 2016

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RimbaudWarrior

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