Sur le papier, c'est vraiment tout ce que j'aime : la nature, le silence, la simplicité. J'en avais entendu beaucoup de bien et j'y allais avec de grands espoirs. Et même si je m'attendais à beaucoup de choses, j'ai quand même été étonné.
En fait, c'est un pur film de mise en scène, totalement dépouillé des artifices narratifs habituels. Pas de dialogues, mais un montage ultra expressif qui dit tout ce qu'il y a à dire, et qui se permet même des effets qui pourraient être poussifs dans un autre contexte, mais qui fonctionnent parfaitement ici.
On a beaucoup parlé du parallèle entre l'expédition dans la grotte et les scènes avec le vacher, mais ce qui m'a intéressé, c'est plus les effets d'échos/rimes amenés par le montage que la portée symbolique (que je trouve assez basique). Par exemple, il y a ce passage avec le médecin qui ausculte en plaquant son oreille sur le dos du malade, et on s'attend presque à entendre les échos de la cavité résonner dans la grotte.
Il y a aussi ces plans sur la progression de la lumière et de sombres, qui donnent à voir ce qu'on ne remarque jamais. Ou le plan où le dessinateur termine la carte de la grotte en refermant d'un trait la cavité. Point final, tout est dit, tout a été montré par un geste simple.
Mais le plus fascinant, c'est que la manière de brouiller la frontière entre fiction et réalité amplifie tous les effets. Dès le début, on sait que l'expédition a réellement eu lieu, mais le film n'est pas un documentaire, puisqu'il recrée toutes les scènes sans chercher à reproduire ce qui s'est vraiment passé. On n'en a aucune idée, on sait juste que le cadre global est inspiré de faits réels et ça suffit. Par contre, le mise en scène évoque tellement bien cette impression de vérité que les plus petits détails se mettent à prendre une importance centrale. On s'attend à voir du vrai, et ça démultiplie la puissance des effets de cinéma.
Le film nous met tellement dans un état d'attention que quand une flamme tourbillonne dans le vide en faisant un bruit beaucoup trop puissant pour être pris en son direct, on est émerveillé qu'une telle chose se produise, tout en sachant qu'elle ne se produit pas. Même chose pour l'image de la page du magazine où la photo de Nixon est brûlée et où le feu a dessiné une petit trou circulaire dans la tête de Kennedy. Si c'était vraiment arrivé, ça serait incroyable. Je sais que c'est fait exprès, et pourtant je ressens quand même l'émerveillement. La mise en scène est tellement intelligente qu'on gagne en permanence sur les deux tableaux de la vérité et de la fiction.
Et puis, un film qui est capable de me mettre un sourire jusqu'aux oreilles juste avec un ballon de foot qui menace de tomber dans un trou, ça compte.