Suite à un buzz mondial, un long métrage qui régénère le cinéma d’horreur avec des adolescentes cannibales


Si les réalisatrices s’aventurent trop rarement dans le genre horrifique, il est étrange d’apercevoir que c’est souvent par le thème du cannibalisme qu’elles l’ont fait : Claire Denis avec sa Béatrice Dalle croqueuse d’hommes dans Trouble Every Day (2001) ; ainsi que Dans ma peau de Marina de Van (2002), sur un vampirisme new age. Le changement de millénaire aurait dû normalement annoncer, à travers ces deux grands films, la mutation de l’héroïne de cinéma en ogresse, car il a fallu attendre une quinzaine d’années pour qu’une nouvelle réalisatrice s’empare de ce sujet. Julia Ducournau a relevé le défi en créant un long métrage intitulé Grave (Raw).


Mise en scène du virus et des pulsions


Premier long métrage de Julia Ducournau (repérée à Cannes pour son court métrage Junior), Grave raconte le parcours semé d’embûches de Justine, 16 ans, étudiante en première année d’une école vétérinaire dont Alexia, sa sœur aînée, est déjà élève. Parachutée en pleine période de bizutage, ce personnage, comme le reste de sa famille, est végétarien. Elle devra avaler pas mal de couleuvres (au sens propre et figuré). Mais surprise : passé le dégoût, Justine commence à développer un étrange comportement. Ce thème vital, et la métamorphose de Justine, s’installe directement dans la lignée du grand cinéaste David Cronenberg avec La Mouche, qui est notamment cité en référence dans le film. Dans la revendication assumée de se référer au cinéma de genre, tout en le transgressant par des prolongements thématiques annexes, un sous texte qui porte tout le film : la perte de l’enfance, la découverte de la vie en société, de la sexualité… Elle va résoudre le problème du passage à l’âge adulte par : Il faut « tuer » ou même : « absorber et assimiler en soi » pour survive. Justine va donc devenir sujette à des pulsions, pas toujours recommandables. Grave ne joue a aucun moment la carte de la provocation, car le cinéaste soigne d’une grande finesse sa progression narrative, tout en la ponctuant d’images choc. Ces dernières ne cherchent pas l’effet pour l’effet, mais s’avèrent autant d’électrochocs destinés à faire réagir, déranger et même réfléchir. Le cinéma n’est jamais aussi puissant que quand il touche l’intime, le corps et à travers lui la conscience. Hors des sentiers battus, très prometteur, Grave reflète la forte personnalité d’une nouvelle cinéaste iconoclaste, entière, talentueuse… Grave.


Léo Jacquet


https://lecoincritique.wordpress.com/2018/01/28/grave/

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le 24 août 2018

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Léo  Jacquet

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