Pour son premier film, Ryan Coogler s'empare d'un fait réel et en fait un petit devoir de mémoire qui saura émouvoir les foules, sans aucun doute. Cette histoire en effet peu banale, qui prend place un jour de l'an, est on ne peut plus tragique et révoltante. Le matériau de base est suffisamment détonant, même seul sur le papier, pour en espérer une version imagée engagée et virulente. Ce n'est malheureusement pas le cas de Fruitvale station qui pour moi survole un peu trop son sujet sans jamais prendre parti.

De cette absence d'implication naît un certain scepticisme, qui s'amplifie lorsque Ryan Coogler insère dans son film des séquences un brin poussives qui n'ont d'autre but que de nous faire aimer ce gentil bonhomme dont on suit la vie. Heureusement pour le réalisateur et son film, cet infortuné est incarné avec une belle énergie par un Michael B Jordan au top de sa forme, qui rend, rien que par sa présence, le film intéressant. Mais bien vite, on tourne un peu en rond et même si la fin vient nous sortir avec violence de notre passivité, ce n'est pas suffisant pour élever totalement l'ensemble.

Fruitvale station ne parvient en effet jamais à prendre son envol. Il finit même par se fondre dans la masse de ces bobines inspirées de faits réels choquants, qui provoquent forcément révolte et tristesse, mais de façon furtive. C'est dommage parce que Ryan Coogler fait parfois preuve d'une belle maîtrise et réussit, avec peu, à joliment rendre l'oppression de ses personnages. En ce sens, toute la séquence dans le métro est superbe, très inspirée en terme de prise de vue. Mais ça vient un peu tard, et ça dure trop peu. Résultat, pas la claque espérée, on sort de ce joli film avec pour seul sentiment celui d'un bon souvenir.
oso
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le 13 févr. 2014

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oso

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