Chagrin d'amour

Co-production hispano-suisse au budget minime, Chimes at Midnight est la dernière adaptation d'une œuvre de Shakespeare par Orson Welles, un film immensément tragique où le cinéaste incarnait l'ami Falstaff trahi par son fidèle compagnon, le Prince de Galles. Le réalisateur considérait ce film, avec The Trial comme son film le plus abouti, et il serait difficile de nier les qualités techniques du long-métrage. La plastique y est sublime, le noir et blanc toujours aussi bien utilisé par Welles, et la mise en scène transpire le baroque lors de la grande bataille, comme la sobriété à rappeler le grand Othello.

Reprenant les plus grands thèmes shakespeariens de l'œuvre originelle dont l'ascension au pouvoir, la jeunesse troublée par ses propres illusions, et la recherche d'un père, le cinéaste incarne à merveille ce personnage auquel il se disait s'identifier, à la fois grossier dans ses manières et philosophe dans ses propos. Tel un ami qui ne saurait chercher autre chose que l'alcool et le réconfort, il renvoie au Prince de Galles ses plus beaux souvenirs d'enfance. Chimes at Midnight est en cela très bien structuré puisqu'il y aura une césure précise de l'oisiveté entre les personnages, telle qu'observée dans le premier acte par cette terrible guerre en milieu de film, qui scelle définitivement le pouvoir aux mains du roi Henri IV.

Le fils, incarné par Keith Baxter, devra désormais assumer ses responsabilités, alors que le spectateur assiste aux derniers moments échangés entre plusieurs personnages. Cette tension culminante est essentielle au film et compléterait peut-être le-certes- excellent Macbeth, dont le pessimisme était étendu sur l'entièreté du film. Le temps passe comme dans un conte au sein de Chimes at Midnight, sans que toutes ces choses aient été prévues d'emblée, et c'est bien la destinée royale comme paysanne qui décidera du sort des protagonistes.

La loyauté à la couronne d'un fils devenu roi, donnant mort à son passé, tandis que Falstaff meurt de chagrin. A ceux qui ont le pouvoir de rester présents physiquement et nobles, s'il s'agisse vraiment de la sagesse que de prévoir les agissements d'une vie sans plaisir(s).