En quatrième vitesse a tous les atouts pour être le meilleur film noir parmi d’innombrables chefs d’œuvre dans cette catégorie. Le personnage principal du film, le détective privé Mike Hammer est aussi dur qu’un Philipp Marlowe dans le grand sommeil : irrésistible pour les femmes, sachant cogner les gros durs, forçant la main pour arriver à ses fins (le médecin légiste trop gourmand ou la personne de l’accueil trop honnête), Mike Hammer n’a aucun principe pour gagner de l’argent. Il envoie sa belle secrétaire séduire des maris pour toucher le pactole de preuve d’adultère et il en fait de même de son côté auprès des femmes mariées. Malgré le nombre de morts que causent cette « affaire », rien ne le fera détourner de sa route hormis la découverte de la quête, qu’il juge trop dangereux et incompréhensible sur le moment, le ramenant à la raison. Le début et la fin du film sont complètement similaires, une femme blonde qui se jette devant la voiture de Mike Hammer en criant et tout le long de la route haletant, scène d’une tension insoutenable mettant tout de suite dans l’ambiance du film. La scène finale, une des plus belles de l’histoire de cinéma montre aussi une femme blonde ressemblant à la première, criant et se consumant telle Pandora en ouvrant la boîte (Spielberg reprendra cette scène lors de l’ouverture de l’Arche d’Alliance dans les Aventuriers de l’Arche Perdue). Entre ces deux séquences (les meilleures du film) Mike Hammer remonte le fil pour enquêter sur la mort de Christina et découvre au fur et à mesure des mystères qu’il ne réussit pas à expliquer. Toutes les scènes du film sont des exemples du film noir, elles réunissent tous les codes du genre : Mike Hammer découvrant sa voiture piégée, la liaison avec sa secrétaire, le grand méchant du film dont on ne voit jamais la tête, juste ses chaussures, les progressions dans des escaliers magnifiquement photographiés avec des stries d’ombre et de lumière, des policiers loin d’être avenants. Chaque interrogatoire de ceux-ci, des bandits et de Mike Hammer pour leurs quêtes sont violents. Et puis surtout ces femmes fatales, Christina qui aura presque provoqué la mort de Mike dès le début du film, la secrétaire de Mike qui use de son charme pour tromper les maris, et Vera, l’une des plus marquantes de l’histoire du cinéma, se faisant passer pour une autre, tirant sur le chef des bandits et sur Mike en moins de cinq minutes, après avoir exigé de ce dernier un baiser qu’il n’aura même pas eu le temps de lui donner. Aldrich réussit un film noir absolument parfait, inoubliable, en avance sur son temps par sa mise en scène, son atmosphère, sa dureté. Le rythme est prenant, servie par une très bonne musique, celle de Nat King Cole et du très bon jazz. Le spectateur est captivé par cette histoire, qui est qui, qu’est ce qui attise tant la convoitise des bandits et des policiers, pourquoi toutes les personnes mêlées à cette affaire ont peur, qu’y a-t-il dans cette boîte ? Lorsque le bandit utilise toutes les métaphores mythologiques pour parler du contenu de la boîte, nous sommes autant intrigués que Vera avant le « bouquet final ». Ce film ressemble en beaucoup de point au Grand sommeil mais l’ultime vérité est beaucoup plus impressionnante et se prête parfaitement à l’époque, le nucléaire tout autant fascinant et inquiétant à la fois.

VinceOurs
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le 31 janv. 2022

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Ours Lyonnais

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