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Clotilde quitte son mari, Ventura. Ce dernier est un ouvrier cap-verdien qui se perd alors entre la vétusté de son ancien quartier, Fontainhas en périphérie de Lisbonne et les logements HLM neuf, Casal Boba dans lesquels s’entassent la population des bidonvilles que l’on reclasse…


Pedro Costa frappe un grand coup avec cet En avant jeunesse / Juventude Em Marcha (2006). Le cinéaste, armé d’une caméra DV prend le temps de mettre en scène ses personnages qu’il connaît si bien pour les avoir fait vivre dans des œuvres déjà emprunte d’un style docu-fiction. Á travers son personnage phare qu’est Ventura, il dépeint le sordide et le désarroi d’une population perdant ses repères puisque délogée de l’unique endroit qui faisait d’eux une famille, une unité (par le lieu de vie). Une lenteur se dégage de sa mise en scène, une lenteur que dégage Ventura lequel se perd dans des décors trop grand pour lui lorsque ce n’est pas des lieux exigus dans lesquels il étouffe.


Comme à son habitude, le parti pris de Pedro Costa est de montrer une misère crue et de nous faire part de la déchéance des hommes via de long plan fixe. Il compose ses cadres de façon majestueuse où de rare rayon de lumière s’invite et où l’obscurité règne en maître. Chaque plan est un tableau devant lequel on reste à le contempler, immobile comme pour mieux s’imprégner de l’ennui lancinant qui ronge les laissés pour compte. Oui, le temps est comme suspendu et nous montre un Ventura, poète semblable à un zombie parcourir une demeure à une autre en adoptant tout ceux qu’il croise.


Dans En avant jeunesse, Ventura est le père de tous. Il tente de recréer un foyer disloqué par le temps, il délaisse petit à petit la carcasse d’un zombie errant pour ne devenir qu’un fantôme qui hante des lieux jadis vivant et qui se meurent petit à petit. Il rend visite à une Vanda sous méthadone et relogé dans une tour au blanc immaculé, aseptisé, clinique. Il se fait chasser par l’un des siens alors qu’il se complet dans le luxe des œuvres d’arts qui l’entourent. Sa condition le ramène vite à la réalité. Les pauvres restent avec les pauvres. Ventura réalise une course contre le temps qu’il a perdu d’avance, son monde disparaît dans les limbes des souvenirs sans point de retour possible.


En avant jeunesse de Pedro Costa n’est pas une œuvre facile d’accès notamment par la fixité de sa mise en scène pourtant elle mérite d’être vue comme une œuvre témoin du changement passé et présent et d’un état des lieux d’une population marginalisée. En avant jeunesse est une très belle œuvre qui confirme le talent de son auteur.

IllitchD
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le 28 août 2012

Modifiée

le 28 août 2012

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