Drunk est mélange comédie noire et drame existentiel avec brio, en imbriquant les aventures de quatre hommes liés ensemble par le même constat mais avec chacun ses problématiques, ce qui permet au film de varier les thèmes. Mads Mikkelsen irradie l’espace de son regard, de son mélange charismatique entre force et faiblesse. Ces comparses Thomas Bo Larsen, Lars Ranthe et Magnus Millang ne sont pas en reste avec des performances très humaines. Si le film souffre de quelques facilités de scénario, l’excellent jeu d’acteur compense largement ses faiblesses.


Quatre amis entre quadra et quinquagénaires, professeurs dans une petite ville côtière danoise, font un constat simple mais un peu déprimant : ils ne sont plus que les témoins passifs de leur vie, et la subissent plus qu’ils n’agissent. Leurs rêves et ambitions se sont étiolés avec le temps et les responsabilités, notamment familiales, et ils ont perdu la flamme.


Leur solution : l’ivresse. Mais une ivresse maîtrisée, sur les pas d’Hemingway, Churchill et Skårderud. Dans un premier temps, l’ivresse agit comme un dopant, lève les inhibitions et redonnent confiance. C’est une forme d’éveil : le quatuor semble retrouver dynamisme, confiance et passion. Comme des adolescents, ils se découvrent une nouvelle jeunesse, insouciante, sure d’elle et de son destin, en contrôle. Mais la situation dérape, au départ de manière comique, puis de plus en plus tragique, l’ivresse passagère laissant place à l’alcoolisme refoulé. Dans l’excès, les voici enfin qui se confrontent à ce qu’ils ont laissé de côté, avec des conséquences plus ou moins dramatiques.


S’ensuit la chute, plus prévisible. Mais Vinterberg n’est pas moralisateur et effectue une pirouette finale, une scène en clair-obscur, pour moi aussi sombre qu’elle est joyeuse. On y voit à la fois un Martin magnifique qui se laisse enfin aller, embrasse le moment présent ; il a à cet instant la fureur de vivre. Il boit encore, trop n’est pas assez, une dernière fois. Ou pas. Le réalisateur reste volontairement ambigu, avec un arrêt sur image d’un Martin danseur crépusculaire : est-il est contrôle ou hors de contrôle ?

AlicePerron1
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le 27 juin 2021

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Alice Perron

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