Deuxième version de référence, il s'agit à mon avis de la plus réussie. Mamoulian était un très grand réalisateur. Et Fredric March est époustouflant.


L'histoire s'ouvre par un plan subjectif. Et ce choix est d'autant plus pertinent qu'il reviendra lors de la première transformation de Jekyll. Quelle brillante idée. Bien entendu, elle sera reprise par ses successeurs. Comme dans le film de Robertson (1920), Mamoulian utilise la surimpression pour montrer les différents stades du changement de Jekyll. Mais ici, la technique est mieux maîtrisée et l'illusion presque parfaite. Il faudra attendre le morphing pour avoir un effet de fondu dans la transformation des visages.


Fredric March est encore mieux en Jekyll-Hyde que ne l'était Barrymore. Sa transformation est - à mon avis encore - formidable. Si Barrymore-Hyde avait une appatrence de dément, March, lui, interprète un Hyde primaire, primate... Simiesque. Hyde est tout ce que la société victorienne de la nouvelle de Stevenson rejette. Il est laid, il est difforme, il est vicieux, il est violent et surtout, il est lubrique. Sa relation avec Ivy Pearson (Miriam Hopkins magnifique) n'est rien d'autre qu'une relation de sexe et de violence. C'est aussi ce qui fait la force de ce film par rapport à celui de Robertson. Elle donne plus d'épaisseur à Hyde et à l'intrigue.


Alors que Barrymore se tassait en devenant Hyde, March, lui, grandit. Et si Barrymore avait un visage encore humain, March n'a d'humain que la silhouette. Il ressemble plutôt à quelque homme préhistorique de type plutôt néandertalien. Il est totalement méconnaissable. Il ne fait pas peur de la même façon que Barrymore. Barrymore, du fait de son regard dément inquiétait. C'est l'impression brutale de March qui inquiète, là. On a peur de sa stature et de sa force.


Et Jekyll, dans tout ça ? Alors qu'avec Barrymore, Jekyll s'effaçait devant Hyde, ici, Jekyll apparaît plus tourmenté. Il regrette plus ce qu'il a fait. Il a plus de relief. Il en devient plus humain.


Et puis il y a l'amour enlacé. C'est le baiser passionné entre Jekyll et sa fiancée, soutenu par les deux fleurs à leurs pieds. Il y a aussi la statue de Psyché ranimée par le Baiser de l'Amour de Canova entre deux gravures de femmes nues. Et puis il y a l'étreinte finale entre Hyde et Ivy. Etreinte finale et fatale.


Un film formidable, donc.

JihesseJi
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs films des années 1930

Créée

le 2 avr. 2016

Critique lue 312 fois

2 j'aime

Jihesse Ji

Écrit par

Critique lue 312 fois

2

D'autres avis sur Dr. Jekyll et Mr. Hyde

Dr. Jekyll et Mr. Hyde
real_folk_blues
7

Hyde and sick: l'hubris lubrique

On connait tous la nouvelle de Stevenson, inutile donc de bâtir un synopsis redondant pour cette œuvre majeure de la littérature gothique de l'époque victorienne, célèbre pour avoir inspiré moult...

le 21 juin 2012

24 j'aime

14

Dr. Jekyll et Mr. Hyde
Sergent_Pepper
7

Double Every Day

L’adaptation de ce grand classique de la littérature fantastique est à contextualiser sur plusieurs plans : c’est la première version parlante, l’un des films de l’ère du Pré-Code, et l’objet de...

le 7 avr. 2021

13 j'aime

5

Dr. Jekyll et Mr. Hyde
Madaraoh
8

Formule 2 en 1...

Voilà un film très intéressant. On connait tous l'histoire du Dr Jekyll et Mr Hyde. Cette version est ultra fidèle au support d'origine. Par contre, je dois dire que j'ai beaucoup aimé l'approche sur...

le 16 oct. 2011

7 j'aime

1

Du même critique