Je pense qu’entre The Strangers et le Dernier Train pour Busan (en attendant Mademoiselle de Park Chan-wook), 2016 restera l’année du cinéma Sud-Coréen. Partant d’un postulat ultra classique, une épidémie transformant la population en zombies, le film de Sang-ho Yeon est certainement ce qui s’est fait de mieux dans le genre depuis L’Armée des Morts et le diptyque 28 Jours et 28 Semaines Plus Tard. Du point de vue du divertissement pur, le film est une franche réussite. Bénéficiant d’un budget très important, il a des allures de blockbuster hollywoodien et est extrêmement généreux en matière de scènes d’actions. Il est très rare que des films d’infectés proposent des grandes scènes de masse mettant en scène des centaines de figurants dans des décors très amples. À ce niveau, le film fait parfois penser à World War Z et nous montre ce qu’aurait pu être ce dernier s’il n’avait pas été aussi frileux et tout public. Des scènes comme l’attaque de la gare illustrent clairement des sommets en matière de représentation de l’apocalypse à grande échelle. La force en revient principalement à la crédibilité de la menace. Généralement, le plus gros reproche que l’on peut faire à ce type de film, c’est que la propagation du virus n’est pas crédible, les zombies étant généralement lents et faciles à tuer. Ce n’est clairement pas le cas ici et j’aurais même tendance à dire que la crédibilité de l’infection n’a jamais été aussi forte ! Les malades sont ici quasiment impossibles à tuer et extrêmement rapides, leur mode de déplacement en nué fait d’ailleurs penser à des insectes. De plus le virus se développe en quelques minutes après transmission ce qui rend la menace d’autant plus dangereuse.
Mais outre la crédibilité du danger, la plus grande force du film est d’avoir situé l’intrigue à 90% au sein d’un train. Je suis depuis longtemps convaincu de la puissance cinématographique des trains (voir le Transperceneige pour s’en convaincre) et j’en ai eu une nouvelle preuve ! Ici, toutes les palettes d’idées possibles et imaginables d’un tel lieu sont exploitées. Que ce soit au travers de la progression au fil des différents wagons pour atteindre la locomotive, l’obligation de transférer les voyageurs d’un train à un autre, l’utilisation intelligente des tunnels (les zombies ne se repèrent pas dans le noir) ou une scène de déraillement ultra impressionnante, rien ne nous est épargné ! À ce petit jeu, le film fait preuve d’une générosité et d’une audace assez folle. Une fois passé le petit ¼ d’heure de mise en place, il part pour plus d’une heure trente d’action frénétique sans temps mort !
De plus, être le blockbuster le plus fun que j’aie vu cette année n’est pas la seule qualité du film. L’ensemble est vraiment bien écrit et évite autant que possible de trop tomber dans la facilité. Par exemple, le film nous présente comme personnage principal un héros au demeurant détestable : un homme d’affaires sans trop de scrupule qui pourrait postuler au titre de pire père de l’année. C’est justement au travers de sa relation avec sa fille que le personnage va se révéler. Pure et pourvue d’un amour inconditionnel pour son papa, cette petite fille va petit à petit humaniser cet homme pour lequel nous n’avions de base aucune sympathie. La dernière partie du film offrant même de grands moments d’émotion entre ce joli duo. Même si l’on pourrait regretter que les personnages secondaires soient un peu clichés (la brute au grand cœur, le couple d’ados romantiques, le clodo un peu fou ou le vieux businessman diabolique), le couple père/fille fonctionne suffisamment pour nous impliquer émotionnellement.
Parfait mélange de fun, de suspense et d’émotion, Le Dernier Train pour Busan est le meilleur blockbuster que j’aie vu cette année (qualitativement très pauvre, à ce niveau, il est vrai). Même si le film n’est pas aussi puissant et poussé au niveau de l’étude sociologique et de la critique de la société que les films de Georges Romero (Zombie et Le Jour des Morts Vivants en tête), il compense cette faible lacune par son rythme et sa parfaite utilisation de son décor principal. À ce titre, l’acuité apportée aux placements de caméra est très bien calculée et la gestion de son espace limité est exploitée au maximum. Malheureusement, il est très peu probable que vous ayez la chance de découvrir ce spectacle vivifiant en salle car, une fois de plus, le film n’est pas distribué en Belgique !


http://alaubergedescinephiles.over-blog.com/

Laubergiste
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films de 2016 et Top 20 Ciné 2016

Créée

le 5 janv. 2017

Critique lue 246 fois

4 j'aime

Laubergiste

Écrit par

Critique lue 246 fois

4

D'autres avis sur Dernier train pour Busan

Dernier train pour Busan
guyness
4

Korean rapsodie

En 2013, lorsque Bong Joon-Ho et Park Chan-Wook avaient traversé le Pacifique pour rejoindre l'usine à mauvais rêve Hollywoodienne, on craignit alors un occidentalisation décevante des meilleurs...

le 29 août 2016

116 j'aime

63

Dernier train pour Busan
thetchaff
8

La ligne rouge

Quand je mate un film de zombies non parodique moderne, j'ai de nombreuses occasions de soupirer. C'est un genre assez codifié et le nombre d'histoires faisant intervenir ces charmants punching-ball...

le 18 août 2016

111 j'aime

10

Dernier train pour Busan
Sergent_Pepper
4

Slowpiercer

Ainsi donc, du Zombie en mode Word War Z (à savoir rapide) dans un train en mode Snowpiercer, le tout en Corée. Il faut bien reconnaître qu’il y avait quand même de quoi se méfier. Et ça dure deux...

le 21 août 2016

97 j'aime

9

Du même critique

American Honey
Laubergiste
5

Hip Hop 2016: la super compile!

Pourquoi avais-je autant envie de voir American Honey ? Et bien, sur papier, le projet me séduisait littéralement. J'aime énormément le travail de réalisatrice d'Andrea Arnold, principalement...

le 11 févr. 2017

24 j'aime

4

Ne t'endors pas
Laubergiste
6

De l'horreur tout en douceur...

Régulièrement, je m'étonne de voir débarquer certaines productions en VOD tant elles auraient eu leur place en salle. C'est le cas cette année avec Before I Wake. Même si d'autres sorties VOD m'ont...

le 4 mai 2017

23 j'aime

1

Demain tout commence
Laubergiste
6

Emotions formatés

Demain Tout Commence est le film français “hype” de cette fin d’année. Il est vrai que tout est prévu pour plaire au plus grand monde, que ce soit par la présence d’Omar Sy, l’acteur préféré des...

le 5 janv. 2017

22 j'aime

5