"Dead man" est un des films les plus connus et appréciés de Jim Jarmusch et pourtant le réalisateur a mis dans ce film populaire des éléments qui ne collent pas avec son cinéma : une fellation ouvertement montrée au début du film, un tueur de sang froid qui écrase le crane d’un type (on voit le crane se fait écraser), une scène de sexe explicite : Jim Jarmusch s’est lâché.
La scène du crâne écrasé m’as traumatisée.


Cette scène gore de Jim Jarmusch est peut-être ce que j’ai vu de plus violent ces derniers mois et peut-être tout court : j’en ai vu des trucs dégueulasses : mais cette scène : c’est vraiment horrible. "Dead man" est explicite à plus d’un point, en plus de placer des anachronismes dans ce western : la prostitution, l’alcool et des dialogues crus qui ne collent pas avec l’époque, le film s’éclate et porte très bien son nom : parce que des morts, on en voit partout et tout le temps.


Jim Jarmusch n’avait jamais été aussi violent et explicite dans un film que dans celui-ci. Il ne ménage pas son personnage, ne lui épargne rien et nous fait part des choses qui caractérisent son cinéma : l’incommunicabilité (le pote de William Blake qui parle on ne sait pas quoi comme langue) ; les personnages qui sont toujours uniques ; un humour bien personnel (comme cette réplique : "Vous avez du tabac ?" qui revient plein de fois) et un portrait de l’Amérique profonde.
Chez Jarmusch, il n’y a aucun optimisme mais en dépit des scènes gores, de l’atmosphère élégiaque de ce film, il y a un grand symbolisme : le retour de l’Homme là d’où il vient dans un final très élégant et triste à la fois : très beau. Pour les neuf millions de dollars que le film a coûté (un des films les plus coûteux de Jim Jarmusch), il s’est vraiment lâché et nous balade, surprends par sa mise en scène caméra a l’épaule et subjective parfois, littéralement, les références et les clins d’œils culturels pullulent : évidemment on est chez Jim Jarmusch : le spécialiste du transcendé de genre.


Johnny Depp très à l’aise dans son personnage et aussi très naturel, on porte presque le même regard que lui sur ses choses qui le surprennent : une fellation faite en pleine rue ; le regard méfiant et inexpliqué des gens ; la haine que les gens ont contre lui mais il aura beau se débattre : rien n’y fera. On le pourchasse. On note aussi ses rencontres iconoclastes (notamment Iggy Pop travesti).


Jim Jarmusch reprends toutes les règles du western : petite ville paumée, armes, saloon, campagne, indiens… même jusqu’au langage mais s’en sert pour mieux les contourner et en faire un film personnel. Le film se paye un casting à la Altman et on entends exclusivement la musique de Neil Young, aucune autre bande originale ne vient coller aux images du film. Jim Jarmusch fait référence à d’autres cinéastes comme Quentin Tarantino (Steve Buscemi ; le goût pour les BO : le personnage bavard et le sang) et aussi d’autres cinéastes comme son mentor Nicholas Ray avec ses séquences subjectives mais aussi Ozu pour ses plans du ciel, Jarmusch est aussi un peu gonflant avec ses fonds noirs qui intercalent les scènes : c’est trop répétitif.


Le sang : il y en as beaucoup dans le film : plein des gens tués par des coups de feu et le sang se vide de leurs corps comme si Jim Jarmusch éprouvait lui aussi une fascination pour le sang, comme dans un des derniers plans où on voit William dans un barque et son bras saigner et arriver dans l’eau et le film étant en noir et blanc : c’est intéressant mais un peu inutile à voir.


Mais on se demande si William Blake ne se serait pas fait piéger ? Il reçoit un courrier pour une embauche qui n’aura pas lieu, quelqu’un l’averti dans le train qu’à Machine : il y a peu de chance qu’il reste en vie et puis il va se saouler, il rencontre comme par hasard cette jeune femme et elle la conduit spontanément chez elle, ils font l’amour et a leur réveil, l’ex débarque et ça tourne au carnage puis Blake avant de se faire tirer dessus plusieurs fois au cours de la traque et


mourir dans sa barque sur l’eau.


Si il n’aurait pas répondu a cet entretien, il ne se serait pas fait descendre.
Il y a une évolution et un regard sur la culture amérindienne a travers le personnage de William Blake par Jim Jarmusch qui s’est visiblement beaucoup renseigné sur le sujet, on apprends des tas de trucs et le film, tourné en Arizona, en Oregon et dans un autre état dont je sais plus le nom, montre une inhumanité profonde, comme si la guerre était passée par la. On ignore quand se situe le film et on ne sait pas pourquoi Jim Jarmusch fait deux plans sur une machine qui je sais pas trop a quoi en plein milieu de la route.
Par ailleurs, devinez d’où vient William Blake, le personnage incarné par Johnny Depp : Cleveland, ville de beaucoup de personnages de Jim Jarmusch et ville où le réalisateur a passé sa jeunesse avant d’aller vivre a New York.

Derrick528
4
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les années 90 que j'ai vu et Les westerns que j'ai vu

Créée

le 7 août 2021

Critique lue 168 fois

1 j'aime

Derrick528

Écrit par

Critique lue 168 fois

1

D'autres avis sur Dead Man

Dead Man
Hypérion
9

Chamanique...

Dead Man, c'est un western halluciné, une échappée mystique et destructrice d'un pauvre comptable (Johnny Depp) brusquement propulsé dans le monde sauvage du far (far) west. Le far west intriguant,...

le 27 avr. 2011

109 j'aime

2

Dead Man
Gand-Alf
9

Road to nowhere.

Quelques petites années après le chant funèbre orchestré par Clint Eastwood par le biais du magnifique "Unforgiven", Jim Jarmusch donne à son tour sa vision toute personnelle du western, sorte de...

le 12 sept. 2014

89 j'aime

Dead Man
Mil-Feux
10

« Il est préférable de ne pas voyager avec un mort »

Un pied devant l'autre, il s'agira de descendre du train sans trébucher, puis d'avancer à travers les nuances de l'un des bouts du monde, entre tradition et modernité, vers les derniers bras tendus —...

le 3 janv. 2016

76 j'aime

4

Du même critique

Love Sux
Derrick528
7

Retour aux sources

Avec le single "Bite Me" sorti il y a quelques mois : un son bien pop-rock et un clip qui nous rappelait les bonnes années 2000, il était clair qu'Avril Lavigne allait revenir à ses sources, à ce qui...

le 25 févr. 2022

3 j'aime

13 vies : Une vision du Japon
Derrick528
7

Traversées humaines

Cet anime anthologique est une adaptation d'"Human crossing" : manga publié entre 1981 et 1991. Il s'agit de 13 histoires indépendantes les unes des autres narrant les histoires de japonais(e)s...

le 10 sept. 2022

2 j'aime

Souvenirs goutte à goutte
Derrick528
9

Ce qu'il nous reste de notre jeunesse

J’ai continué mon cycle Takahata avec « Souvenirs goutte à goutte », c’est le film qui m’intriguait le plus dans la filmographie du réalisateur, ayant lu vaguement le pitch : d’une personne se...

le 7 oct. 2021

2 j'aime