Cruel
6.3
Cruel

Film de Éric Cherrière (2017)

Eric Cherrière signe ici son premier métrage et met en scène un tueur en série dans une ville teintée au fil des saisons par ses couleurs ou sa solitude.
Un essai réussi de part sa direction sans spectaculaire ni gore, axant plutôt sur l’intime, relatant simplement la vie d’un homme ordinaire. Le metteur en scène ne donne pas d’explication et ne tombe pas dans la généralité des films de genre. C’est peut-être le flou qui l’entoure qui peut à la fois déranger mais être apprécié ne sachant jamais vraiment ce qui pousse l’homme au meurtre. Le metteur en scène pointe la ligne ténue pour signifier la dualité en chacun de nous et notre manière d’exprimer notre violence.


En pleine crise existentielle et en quête de rédemption il n’en reste pas moins qu’il est un assassin. Poursuivi par ses souvenirs de lui, enfant, et de ce bonheur perdu qu’il cherche à retrouver, il s’occupe seul de son père, prend des petits boulots et déambule à la recherche de ses victimes.
Dès le départ la tension se révèle par ses regards insistants et son calme.
Victime lui-même, s'interrogeant sur la société, les difficultés de communication et l’hypocrisie l'homme renvoie ses obsessions à ses victimes lors de leurs (de ses) discussions. La banalité des situations ne fait que renforcer l’horreur. Cet aspect presque normal qui peut d’ailleurs le plus inquiéter amène curieusement à ce que l’homme qui peut être un proche, un ami, ou un parent se révèle attachant notamment dans sa seconde partie où la métamorphose se suggère grâce à la rencontre avec une femme. On percevra le changement, son visage reposé, son changement d'allure...


La mise en scène est lente, les décors froids, l’ambiance austère, parfois quelques bruits inquiétants dans sa maison, rêve ou réalité, nous ramène à la folie de l’homme ou encore ses souvenirs, au fantasme d’une vie rêvée...La caméra jouera d’ailleurs de plans resserrés, d’enfermement et d’images floutées, nous posant l’homme comme ailleurs…Accompagné d’accordéon aux sons redondants tout concoure à une ambiance sourde et perturbante.


Jean-Jacques Lelté pour son premier rôle accroche et livre une performance subtile au fil de l’intrigue. Tout en retenu l’acteur est fascinant et particulièrement inquiétant.
Magali Moreau actrice de théâtre est lumineuse et ses sourires francs ramènent à une candeur enfantine et salvatrice pour l'homme.
Dotée d’une sobriété et d'un pessimisme qui font penser aux belles pépites espagnoles ou australiennes, un film définitivement noir et pourtant romantique, une recherche d’écriture et une ambiance plutôt contemplative que je conseille volontiers.
Et puis : Grand Prix à Busan en Corée…/...

limma
7
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le 4 déc. 2017

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