Le Dieu de Carnage est une pièce relativement drôle, assez mordante et cynique. Je l'ai lue il y a maintenant de nombreuses années mais j'en garde un fort bon souvenir. Sur scène, son adaptation doit être terriblement délicieuse car elle peut donner lieu à un huis clos inventif.
Sur pellicule, elle n'a plus trop d'intérêt et se heurte à un réalisme qui ne peut laisser place au décalage provoqué par le texte. En effet, cette histoire de deux couples qui ne se connaissent ni d'Eve ni d'Adam et qui parlent à bâtons rompus de tout et de rien alors qu'ils répètent qu'ils ont d'autres chats à fouetter, est tout à fait envisageable au théâtre qui est une porte ouverte au burlesque, voire au surréaliste. Mais dès que cela passe par la moulinette d'une caméra, ça ne rend plus rien et les effets tout à fait artificiels qu'exige le scénario de base nous sautent aux yeux (les deux couples devant quasiment toujours être dans la même pièce).
Pour ma part, je n'ai pas pu m'en détacher et ça m'a gâché tout le fond du film. De plus, le texte n'a pas forcément été assez retravaillé pour le cinéma, les répliques souvent trop théâtrales font tiquer. La réalisation, quant à elle, n'a guère d'intérêt.
Le seul, et tout de même grand, intérêt de Carnage reste donc les comédiens. Quatre excellents acteurs qui se délectent de leur rôle. Entre Kate Winslet qui pète un boulon derrière ses sourires forcés, Jodie Foster en BoBo hystérique, Christoph Walz en avocat cynique et John C. Reilly en gros beauf fataliste, il y a de quoi faire. Les compositions sont soignées.
Malheureusement, le tout reste vain, n'apporte pas grand-chose et souffre, peut-être même, d'un manque de réactualisation dans ses thèmes (la pièce date de 2007, quatre ans c'est long finalement). Cela manque donc un peu de propos liés à l'actualité un peu plus récente. Et puis, avec une telle confrontation qui monte crescendo, le film accuse une durée ridiculement petite : 1h20. J'avoue qu'à la dernière scène je me suis dit « ça y est, le film devient enfin intéressant ! » et paf, c'était fini...