Un maestria technique au service d'une relecture un peu mince

Il n’y a rien de plus ardu que de vouloir faire une suite à un film culte, réputé intouchable, sans risquer de sa casser la figure. Et c’est quand même bien souvent ce qu’on voit aujourd’hui dans le paysage cinématographique (américain). On peut donc de prime abord féliciter Denis Villeneuve de s’en sortir aussi honorablement. C’est sûr, il souffrira toujours de la comparaison avec l’ancien, et de cette fameuse question « y avait-il besoin de faire une suite à Blade Runner ? ». Tout en respectant l’oeuvre originelle, Villeneuve en propose une nouvelle lecture, puissante, différente.


Là ou Ridley Scott montrait un futur moite, poisseux, collant, très organique, Villeneuve fait un virage à 180° avec son esthétique froide, humide, détaché. Toute cette esthétique, sublimée par des plans à couper le souffle et un son à détruire votre meilleure sono concourent à non pas se détacher du premier film, mais à aller plus loin dans son raisonnement.
Là où Blade Runner présentait le dernier souffle d’humain, ce besoin organique de se prouver comme un être de chair et d’âme, Villeneuve, aidé du scénariste du film originel, continue son questionnement métaphysique sur une note encore plus robotisée : qu’est-ce qu’être humain ? Mais aussi, souhaite-t-on être humain ? A-t-on besoin de lui pour valider notre existence ?


Villeneuve s’approprie l’oeuvre de départ, et y insuffle toute sa maîtrise technique. Il n’y a pas à dire, Blade Runner 2049 est une des plus belles réussites techniques de 2017. Son amour du détail, son choix d’ambiance colorée et de matière, son sound design qui nous scotche à notre siège. Quelques mois plus tard, il m’a suffit d’entendre une partie de la musique pour avoir envie de me replonger illico dans le film, c’est dire la puissance de l’univers développé.


A tel point qu’au premier abord, la maitrise technique couvre les failles du scénario.Le film garde de nombreuses incohérences malgré tout et ouvre des pistes inutiles à mon sens, comme la révolte qui gronde. Le scénario est somme toute assez mince. Si nous sommes subjugués par la beauté du film et le sthène métaphysiques qu’ils soulève, il est presque un objet contemplatif qui pousse à la réflexion, mais ne nous raconte pas grand chose. Si on devait résumer factuellement l’intrigue, nous n’irions pas loin. Le dénouement ne nous surprend plus, nous devenons au fil du film aussi détaché que K (Ryan Gosling).


Du côté du casting, ont eteidnar avant tout les prestations de Ryan Gosling (K) et Ana de Armas (Joi). Harrisson Ford semble bien perdu, parachuté dans ses anciens rôles. Jared Leto ne convainc pas vraiment, ses lignes de dialogue étant trop boursouflées, sonnant fausses.


Si le film reste incroyable il est une contradiction : à la fois blockbuster répondant aux recettes classiques, et pourtant avec une saveur unique, une suite qui ne déçoit ni ne trahit son modèle, mais qui pourtant ne parvient pas à insuffler autant d’imaginaire.

AlicePerron1
8
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le 2 oct. 2018

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Alice Perron

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