Un jour, chez Universal, on raclait les fonds de tiroirs d'une session de brainstorming où le Vermouth avait pris le dessus sur la prudence. Une page informe, froissée par un esprit que le grammage avait mis en déroute, tomba du fond du compartiment sous les secousses des exécutifs en plein désespoir d'idée. Nul parmi les présents ne parvint à déchiffrer le papelard, qui fut expédié illico au service de graphologie de la CIA. Le lendemain, le verdict parvint au studio. Il s'agissait, sans aucun doute possible, d'un jeu de bataille navale. Il faut croire que certains des participants au brainstorming en question s'étaient fait chier, et avaient décidé de distraire leur ébriété avec un truc ludique.

Il n'en fallait pas plus pour qu'Universal, compagnie connue pour son calcul des risques (pour rappel, nous sommes à peine un an après l'incendie de leurs entrepôts, qui sera tenu secret pendant dix ans et aura causé la destruction d'environ 50 000 films sur pellicule, ainsi qu'un bonne centaine de milliers de bandes masters d'artistes dont la liste est consultable en ligne), prenne un décision des plus raisonnées. La bataille navale ? Faisons-en un film ! Le budget ? Ooarf, mettons... 150 millions de dollars ? Ce serait bon, pour commencer ? Et puis pour les surcoûts, on ira jusqu'à 220 millions. Oui, oui, c'est stratégique. On caste Rihanna et Liam Neeson et on placarde leurs tronches partout sur la promo, même si ce sont des personnages quasiment tertiaires à l'échelle du film. Non, vraiment, ça va le faire. Comment ? Un scénario ? Bah... des méchants aliens. Qui viennent sur terre. Pourquoi ? Euh, bonne question, mais ils font péter des trucs avec des pneus maléfiques et leur chef a une petite barbiche en piquants d'oursins. Ouais, ça c'est pour faire diversion. Comment ils viennent ? Ah, ben, en vaisseau spatial. Hein ? La bataille nav... Ah oui, putain, alors en fait c'est normal, les vaisseaux se transforment en cuirassés quand ils arrivent dans l'eau. Si si, ça marche, je vous dis.

Sauf qu'encore une fois, le Vermouth prit le dessus. L'équipe d'écriture, chargée d'étudier la bataille navale pour en tirer une semblance de scénario, confondit la fiche des règles du jeu avec le bulletin de bingo de la mémé d'un des stagiaires. Aussi, ne cherchez pas le concept de la bataille navale dans le résultat, que seuls la cécité ou le Vermouth (on y revient toujours) pourraient vous faire endurer avec bonhommie. En revanche, comme bingo de tous les trucs les plus glorieusement américano-ricains à foutre dans un blockbuster, c'est diablement divertissant.

Saurez-vous tous les retrouver ?

1. Un accident de bagnole

2. Un match de baseball

3. Un savant geek tout couillon

4. Un acteur britannique qui fait un accent US.

5. Des méchants aliens

6. Un grand frère badass

7. Un vétéran badass

8. Des papis badass

9. Un placement de produit complètement abusé (pour Subway, en l'occurrence)

10. Du hard rock pendant une scène d'action.

11. La NASA

12. Des explosions

13. Rihanna avec un méga-gun

14. Des enfants en danger

15. Une bromance torride

16. Une power walk au ralenti

17. "I've got a bad feeling about this..."

18. Une blondasse à bonnet D

19. Une cérémonie de remise de récompenses où tout le monde porte du blanc.

20. Des explosiooooooons

21. Un accident d'hélico

22. "I got this..."

23. Un plan depuis l'intérieur d'un canon

24. Des avions de chasse

25. "The honor was mine."

26. Barack Obama

27. Une scène post-générique

28. Des drapeaux flottant majestueusement au vent.

29. Des insultes pétées pour rester PG-13

30. "... not today!" (x2)

31. Une demande en mariage

32. Barack Obama

33. Des eeeeexploooosions

34. Des bidules en CGI qui pètent d'autres trucs en CGI.

35. Un personnage de tête brulée incapable de gérer l'autorité, qui n'en fait qu'à sa tête et finit quand même par avoir raison.

36. Un match de foot

37. Des poneys (car ce sont eux, en fait, les véritables héros de tout ce bordel)

Amusez-vous bien et gare au Vermouth. Consommation, modération, etc.

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le 15 nov. 2023

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Orpheus Jay

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