Avec Oslo 31 août, Joaquim Trier avait frappé fort en nous plongeant dans la tête d'un dépressif toxicomane. Dans Back home, il récidive et nous propose cette fois une plongée vertigineuse dans la vie d'une famille déchirée suite au suicide de leur mère et épouse. Connue dans le monde pour son travail photographique, Isabelle Reed, artiste engagée mais néanmoins femme et pilier d'une famille, hante les esprits de ses proches endeuillés. Pourquoi a-t-elle mis fin à ses jours ? Comment accepter ce geste qui s'apparente à un abandon, une trahison ? Trois ans après sa mort, ces questions sont plus que brûlantes et nécessaires car bientôt, les raisons jusqu'alors cachées de sa mort vont être dévoilées par la presse.
Drame émouvant, Back home a pour qualité une atmosphère singulière, une esthétique visuellement sublime et un jeu d'acteur irréprochable. Porté par un casting 4 étoiles, le film peine pourtant à emporter une pleine adhésion. En effet, le réalisateur fait le choix de la subtilité et des sous-entendus dans son propos. Les personnages expriment avec difficultés leurs émotions. L'indicible et la pudeur font loi. Parfois, les phrases semblent obscures. Souvent, le personnage n'en dit pas assez. Donner forme à ses pensées semble douloureux ou impossible. Joaquim Trier opte également pour une sur-esthétisation du film. Ces deux partis-pris font de ce film une oeuvre très subtile mais qui, par conséquent, peine à retenir le spectateur. Sa lenteur, son manque d'évidence et de pathos pourront en décourager plus d'un. Personnellement touchée par celui-ci, je ne suis qu'à demi-conquise car le film manque à mon sens de scènes fortes/emblématiques.
Ci-dessous une critique plus approfondie :
Dans ce drame poignant, père et fils vont devoir enfin faire face à la réalité, en espérant faire le deuil de la défunte. Parallèlement, les flash back entremêlés de l'ensemble des personnages nous livre une vision globale de la vie menée par la morte et nous amènent à éprouver ses joies et ses peines. Ainsi, si l'attention est principalement portée sur la manière dont les membres de la famille vivent sans elle, alternant constamment entre leurs souvenirs et leur présent, le réalisateur fait également le choix de nous offrir une scène fondamentale (LA scène à ne pas manquer) dans laquelle la voix d'Isabelle accompagnant ses propres souvenirs nous révèle les sentiments qui ont motivé son acte. Marqué par l'un des éléments de définition essentiels de la disparue, le film en profite pour nous immerger dans un univers esthétique laissant la part belle aux arts : la photographie, la littérature y sont tout particulièrement à l'honneur. La manière de filmer se veut plus dynamique et prodigue en effets stylistiques que dans son précédent film. Ces éléments apportent de la variété et du style à l'oeuvre. Qu'on se le dise : ce film est beau esthétiquement et fluide dans son déroulement. Comme à son habitude, Trier y campe une atmosphère singulière, lourde et mélancolique, qui fait tout le charme de son film. En revanche, à la différence d'Oslo, 31 août, le film ne véhicule pas une idée de suffocation mais au contraire, clôt son sujet sur une porte ouverte, un espoir naissant. SPOILER : Chaque personnage se confronte à ses peurs et tente de résoudre ses problèmes liés à la mort d'Isabelle : le père se décide enfin à obtenir une réponse sur les possibles infidélités de sa femme, l'aîné comprend qu'il se sent coupable et tente de dissiper ce sentiment de culpabilité, le cadet apprend les véritables circonstances de la mort de sa mère et choisit de sortir de sa léthargie apparente.