Irrévérencieux. Voilà ce que ce film tend a être. Et cela rend l'expérience (en salle) extrêmement jouissive. Car oui Chazelle nous sert, avec ce film chorale qui se tue à déconstruire le glamour du cinéma, une réelle et puissante déclaration d'amour au cinéma.


Un film qui n'hésite pas à salir, au sens propre comme figuré, les personnages qui en ont fait l'histoire ainsi que l'histoire elle même du grand Hollywood. Une fresque de trois heures, des destins croisés qui à l'heure du passage du muet au parlant vont tenté de garder ou de faire leur place dans le décor du star-système de l'époque. Cela implique donc des échecs, de la déchéance, des larmes, du sang...

Le film tisse une toile à un rythme effréné, entre fête orgiaque et plateau de tournage chaotique pour mettre en place cette histoire qui nous permettra de comprendre le fonctionnement de l'industrie du cinéma de l'époque sur font de rêve américain (le personnage de Manny), évidemment.


Tout, dans ce film, est la pour nous faire comprendre une partie de l'immense part d'ombre du 7ème art, mais plus globalement de la part d'ombre qu'implique la réussite et la notoriété, dans les années 1920, ou le cinéma était muet et perçu comme un art mineur, par les comédiens de théatre notamment. Le passage au cinéma parlant mit un coup de frein car tout est arrivé très vite et laissa sur la paille de nombreux acteurs, actrices, réalisateurs(trices)... qui ne pouvaient suivre le mouvement, au détriment d'autre qui étaient les "visionnaires". D'anciennes stars sont littéralement tombées dans l'oublie quand le cinéma c'est mis à usé de la voix.


Alors, effectivement, comme moi dans le paragraphe précédent, Chazelle avec son propos global enfonce une porte ouverte. "Chantons sous la pluie" de Stanley Donen sortie en 1952 racontait déjà cette époque d'Hollywood. Tout cinéphile averti sait que les années 1930 ont été l'une dés, voir la pire, décennie de cinéma américain justement à cause de la chute du modèle préexistant. Qui plus est, le jeunes réalisateur prend le partie prix de montré les choses brutalement, sans concessions aucunes, quitte à parfois rentré de le trash ultime. Fait il cela pour faire réagir le spectateur ? Pour faire tout simplement parler ? Certainement. Ajouté cela à un propos bateau sur une partie de l'histoire déja bien connue de tous et n'avons nous pas là un film oubliable et gros budget, gros casting pour finalement... pas grand chose ?


Et bien, non. Le film pousse certes les curseurs très loin (un éléphant qui défèque sur deux pauvres hommes, une golden-shower, de la drogues, du sexe, du vomi, etc...), le film dépeint peut être le milieu hollywoodien comme un milieu de dépravation totale mais le film est avant tout conscient de lui même. Le film ne ment pas car quand on aime quelqu'un ou quelque chose, on se doit d'être honnête avec lui. Damien Chazelle montre ici sont amour pour le cinéma autant que son amour pour la réalisation, son amour pour le fait de donner au spectateur quelque chose de vrai, sans concession. Il nous offre ici une fresque de 3 heures, foutrement bien filmés, avec une musique originale encore une fois très bonne et bien utilisé composé par Justin Hurwitz, des comédiens de très grandes classes (Diego Calva se révèle de quelle belle manière !) et une sincérité qui transpire dans chaque plan, qui est l'une des marque de fabrique du réalisateur Franco-Américain qui fait à chaque fois des films qui lui ressemblent et dont il maitrise totalement le sujet.


Alors oui, certains pourront dire que le film est trop long, que les plans sont bordéliques, que la musique est trop prégnante, que la distribution est incroyable "sur le papier" et que cela ne fait pas un grand film ou encore qu'il ne faut confier des budgets (pourtant le film n'a couté "que" 80 millions de dollars) à un jeune réalisateur qui ne signe ici que sont quatrième film. Tout est discutable dans Babylon et c'est ça la force de ce film. Le film est une prise de risque, une prise de risque de 3 heures et 8 minutes, qui, une fois que vous êtes assis dans vôtre confortable siège de vôtre salle de cinéma, vous transportera ou non, dans une époque, dans un monde, et vous forcera tout simplement à devoir vous rendre ensuite au bar le plus proche pour débattre avec vos amis de ce que vous venez de voir.

Gal-Bickle
8
Écrit par

Créée

le 18 janv. 2023

Critique lue 10 fois

Gaël Bickle

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