“Keep telling the story, you’re doing it right!”

Plonger dans un nouveau film de Wes Anderson, c’est retrouver tous les éléments qui caractérisent tant son style, au plus grand plaisir/déplaisir de ses admirateurs/détracteurs. Asteroid City n’échappe nullement à la règle. Après French Dispatch, où différentes séquences sans lien narratif étaient juxtaposées, on retrouve dans ce dernier film une narration plus linéaire, à une mise en abyme théâtrale près.

Que se cache-t-il derrière tout ce qu’on a déjà vu mille fois chez Wes Anderson ? Le rythme infernal du récit, le casting XXL, les décors chatoyants aux couleurs vives, les plans symétriques et les travelings latéraux, etc.

Tout d’abord on notera une dimension tragique sans doute beaucoup plus présente que dans ses précédents films : dans un univers peuplé d’enfants, d’adultes et jeunes la tête dans les étoiles, il reste des adultes endeuillés, frustrés, désabusés et d’autres qui font la guerre (les militaires qui gardent le site, les essais nucléaires au loin). Il n’y aura qu’une rencontre inattendue pour retrouver un semblant d’horizon commun entre tous ces personnages. Comme Augie et Midge se faisant face de part et d’autre du cadre et discutant de la fenêtre de leur bungalow ou encore Augie et celle qui aurait dû jouer sa femme discutant entre immeubles interposés, Anderson joue de cette distance entre les personnages, et entre eux et nous spectateurs. En effet, le style de mise en scène si caractéristique opère avec un certain hermétisme empathique et nous enferme dans sa bulle fictionnelle.

La fiction comme seule issue possible dans un monde essentiellement tragique dont le sens nous échappe ? C’est le message que livre quasi littéralement le metteur en scène dans une des séquences. D’ailleurs, seules les séquences théâtrales sont en couleurs, les interludes étant cantonnés au noir et blanc. Le film se finira sur un panorama de ce petit univers qu’on aura pris bien du plaisir à découvrir pendant deux heures, renforçant là sans doute l’idée de la fiction comme fuite en avant, à toute berzingue, comme le dernier train pour San Fernando.

Gabagool
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le 18 juin 2023

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