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Anatomie d'une chute est un film français sortit en 2023, réalisé par Justine Triet.


Le film raconte l'histoire d'un procès, visant à prouver la culpabilité/l’innocence de Sandra, une écrivaine allemande qui aurait tué son mari. Daniel, leur enfant, doit faire face aux découvertes qu'il fait sur ses parents, leurs forces comme leur faiblesses.


J'ai beaucoup aimé ce film qui, durant ses 2h30, à su me tenir en haleine, me faire rire, frissonner, réfléchir et me perdre.


Au niveau de la réalisation, j'ai beaucoup aimé les plans variés et recherchés, avec des techniques de cinéma rappelant des films de procès plus traditionnels, comme des champs/contre-champs sur trepieds, mais aussi avec d'autres plans appartenant clairement au monde du documentaire. Je n'ai pas été surpris de découvrir que Justine Triet avait commencé sa carrière avec du documentaires. Pendant mon visionnage j'ai particulièrement appréciés les zooms, parfois violent et inattendus, qui ponctuent le film. J'avoue ne pas avoir compris leur intérêt, mais je trouvait que cela apportait une certaine "légerté" à ce film, traitant de sujet lourds comme le deuil, le suicide ou les violences au foyer. Car oui, même si le film est fort et traite de thème sérieux, il se permet régulièrement de ne pas se prendre au sérieux. C'est amusant de regarder un film de procès et d'entendre des rires dans la salle à plusieurs moment. A mon avis, c'est un des procédés que Triet utilise pour captiver le spectateur pendant tout ce temps.


J'ai également adoré un élément qui joue une place majeur dans le film. Le son. Parce que même si la plupart des images sont évoquantes et lourdes de sens, le son l'est encore plus. J'ai trouvé que le hors champs était illustré à la perfection par une ambiance sonore qui se concentre autant sur ce que l'on voit, que ce que l'on peut entendre mais que l'on ne voit pas. A mon sens, c'est en partie pour montrer que Daniel, l'enfant avec un problème de vision, a entendu, et entends pendant tout le récit des choses que les autres personnages ne perçoivent pas. Et c'est peut être grâce à ce "don de clairvoyance" que le procès se finit grâce à son témoignage, en faveur de sa mère. Car oui, pendant ce film, le personnage omnibulant n'est ni l'avocat, ni Sandra, mais bel et bien Daniel, qui nous montre le procès au travers de ses yeux, et de ses oreilles. Pendant le film, j'ai vécu la musique comme un élément au centre de l'histoire. Chaque personnage à son thème. Le morceau reggea pour le père, qu'on ne voit jamais joué, comme si le personnage était déjà absent dès le début. Le morceau de piano rapide pour Daniel qui, au fur et à mesure que des preuves viendront commencer à accabler sa mère, le jouera de mieux en mieux, comme une métaphore de sa conviction de la culpabilité de sa mère. Enfin, le morceau de Sandra, joué par Daniel juste avant le témoignage qui fera basculer le procès, comme une prise de choix radicale.


Il y a aussi un aspect féministe qui m'a énormément marqué pendant tout le film. Sandra, femme étrangère, doit prouver son innocence auprès d'hommes français (le procureur, son avocat et même son fils). Peu de femmes sont présentes durant le film, hormis l'étudiante qu'on aperçoit pendant les première scènes du film, et la juge qui prendra la décision finale. J'ai vraiment ressentit un affrontement que Sandra doit mener contre tous les hommes du film, tandis que les femmes sont plus compréhensives envers elle. Il me reste encore à l'esprit la scène que je considère la plus forte du film, celle des enregistrements audios. Dans cette scène Sandra fait face à un spécialiste, qui a retrouvé des enregistrements audio d'une dispute avec son mari. La scène se passe en flash-back, et nous voyons Samuel (le mari) reprocher à Sandra son échec. Pendant la conversation, on se rend compte que Samuel l'accuse de son échec, en lui reprochant de ne pas en faire plus. Il s’énerve vite et déballe de nombreux arguments plus ou moins recevables, tandis que Sandra reste calme. Ce qui est magistral dans cette conversation, c'est que sous des airs tout à fait louable d'homme parfait, faisant l'école à son fils ou aidant au taches du foyer, on comprends que Samuel considère comme naturel que Sandra fasse plus de tâche à la maison. Comme si, d'une façon innée, l'homme faisait des projets, et sa femme devait abandonner sa vie et tout mettre en œuvre pour que son mari réussisse. Et c'est, d'après ce que l'on comprends, déjà le cas. Sandra a déménagé en France pour faire plaisir à Samuel, accepté de déscolariser son fils, et de parler une langue qui n'est pas la sienne, même si elle fait un compromis sur l'anglais. Bref, au travers de ces quelques phrases anodinement prononcés, on peut entendre des abérations machistes, qui ne devraient plus être acceptés.


Même si j'ai énormément apprécié ce film, la fin m'a laissé perplexe. Je ne comprends pas ce que les scènes après le tribunal racontent. Après des discutions, je me suis rendu compte que je n'étais pas le seul. Je n'ai pas vu d'ouverture, là où une réflexion sur l'acceptation d'un suicide paternel aurait pu être une piste plus logique.

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le 6 oct. 2023

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