Pendant la projection d'An Elephant sitting still, il est impossible d'oublier que son réalisateur, Hu Bo, s'est donné la mort à 29 ans, une fois son film terminé, avant même sa présentation au public et notamment sa première à la Berlinale 2018. Il y a dans ce film dostoïevskien tellement peu d'espoir en l'humanité, à travers la grisaille de ces vies misérables exposées à l'écran ! Ce pessimisme est conforté, si l'on peut dire, par une vision terrible d'une Chine post-industrielle où les relations entre les êtres ne semblent plus pouvoir exister autrement que par la violence. Techniquement parlant, An Elephant sitting still est bluffant de maîtrise, d'autant qu'il s'agit d'un premier long-métrage, Hu Bo ayant adapté son propre roman. Longs travellings et sens inné du cadre, dans des endroits confinés ou des décors de terrains vagues, la noirceur de l'atmosphère est rendue avec une constante vision qui participe à un climat général quasi post-apocalyptique. Le cinéaste privilégie les scènes à deux personnages avec des conversations où de lourds silences marquent l'absence de réelle communication. Ou sinon, ce sont des cris; des injures et de la violence. Grand film, alors ? Peut-être sur la forme mais il a l'inconvénient majeur de durer 3 heures 50, ce qui est beaucoup trop, d'autant que les relations entre les 4 personnages principaux et leur environnement sont parfois opaques. Le récit tourne en rond fatalement, emprisonné, lui aussi, dans cette gangue d'obscurité infinie que rien ne vient contrebalancer si ce n'est ce fantasme irréel qui donne son titre au film. Noir c'est noir et il n'y a plus d'espoir.

Cinephile-doux
5
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Au fil(m) de 2019

Créée

le 6 janv. 2019

Critique lue 2.5K fois

17 j'aime

Cinéphile doux

Écrit par

Critique lue 2.5K fois

17

D'autres avis sur An Elephant Sitting Still

An Elephant Sitting Still
Shania_Wolf
10

Sans Soleil

Dans ce qui restera l'unique long-métrage de Hu Bo, qui mit fin à ses jours peu de temps après l'avoir achevé, le fond et la forme s'associent pour accoucher d'une œuvre d'une grande force lyrique...

le 8 janv. 2019

49 j'aime

5

An Elephant Sitting Still
Sergent_Pepper
8

Apocalypse slow

Le constat ne manque pas de paradoxe : dans l’histoire de l’art, l’inspiration doit une part grandissante au pessimisme. Alors que les premières représentations insistent sur l’idée d’une trace à...

le 9 nov. 2020

36 j'aime

6

An Elephant Sitting Still
Moizi
8

Behemoth

An Elephant Sitting Still est un sacré morceau de cinéma, non seulement pour sa lenteur et sa durée, mais surtout parce qu'il met du temps avant de se révéler. Disons qu'au cours du film j'ai tout...

le 8 janv. 2020

35 j'aime

1

Du même critique

As Bestas
Cinephile-doux
9

La Galice jusqu'à l'hallali

Et sinon, il en pense quoi, l'office de tourisme galicien de As Bestas, dont l'action se déroule dans un petit village dépeuplé où ont choisi de s'installer un couple de Français qui se sont...

le 27 mai 2022

75 j'aime

4

France
Cinephile-doux
8

Triste et célèbre

Il est quand même drôle qu'un grand nombre des spectateurs de France ne retient du film que sa satire au vitriol (hum) des journalistes télé élevés au rang de stars et des errements des chaînes...

le 25 août 2021

73 j'aime

5

The Power of the Dog
Cinephile-doux
8

Du genre masculin

Enfin un nouveau film de Jane Campion, 12 ans après Bright Star ! La puissance et la subtilité de la réalisatrice néo-zélandaise ne se sont manifestement pas affadies avec Le pouvoir du chien, un...

le 25 sept. 2021

70 j'aime

13