Pour un premier long-métrage qui m'a vivement été recommandé, et, ne connaissant pas Charlotte Wells, j'ai été emporté par ce film.

Aftersun s'ouvre sur une vidéo de vacances comme on peut en retrouver dans nos archives.

Une petite fille enjouée, Sophie filme son père, Calum.

La séquence se stoppe assez brutalement et on aperçoit cette même jeune fille devenue grande, dans le reflet du téléviseur.

Elle regarde l'image fixe, plongée dans cette atmosphère froide, bleutée qui nous suggère le gouffre la séparant du passé.

De retour dans ses souvenirs, Sophie passe des vacances avec son père.

Ces moments partagés qui peuvent sembler ordinaire (farniente, repas et karaoké, danse, jeux) sont l'essence même du film.

D'emblée on nous y présente une relation père/fille complice, protectrice (séquence où Calum lui inculque l'autodéfense, mais aussi les préceptes qu'elle connaît par cœur sur les dangers du monde extérieur). Une relation que l'on peut presque qualifier de frère et soeur au vu du jeune âge du père et de la manière dont c'est filmé.

Un élément pourrait retenir notre attention : l'absence de la figure maternelle (seul un coup de téléphone nous indique qu'elle existe). Pour autant, ce côté est effacé par la place uniquement accordée à la relation père/fille, aussi touchante que complexe.

D'un côté, cette petite fille solaire qui se retrouve vite submergée entre les prémices de l'adolescence, l'appréhension de certains sentiments naissants dans le cadre des jeunes amours et l'excitation des vacances.

De l'autre côté, bercé par une musique sombre, voire parfois stressante, le père dont on ne sait pas grand chose. Calum ne semble jamais trouver sa place parmi ce qui l'entoure. En proie à des tourments cachés (dont à aucun moment on n'y revient, ce qui laisse le spectateur plein d'interrogations sur son passé, sur les éventuelles souffrances vécues), il a un côté attachant malgré les nombreuses esquives aux questions de Sophie, dénotant un manque de communication avec elle.

Ce silence illustre l'incompréhension que peuvent ressentir certains enfants face à leurs parents, qu'ils ne connaissent pas vraiment au fond.

Là encore le parallèle peut être fait avec la lumière intermittente des stroboscopes, où tout semble flou, difficile à entremêler.

Alors pour comprendre, on rembobine cent fois les cassettes, on analyse chaque geste.

Les sentiments s'entrechoquent.

Je pensais que ce film allait être long et que l'intrigue n'allait pas suivre, mais sa sensibilité et la complexité des relations familiales, mais surtout des relations que l'on a avec soi-même m'ont convaincu.

Un très beau film où le focus est porté que sur une seule relation, celle d'un père mélancolique et de sa fille, essayant de le comprendre, voire même de le réconforter.

Mcassiede
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le 3 août 2023

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Mcassiede

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