À l'image de la société américaine, 99 homes est atteint de schizophrénie. Le rêve américain y tourne en boucle et se mord la queue, le récit lui-même fonctionnant en spirale dans un mouvement au final attendu.
Cette identité trouble, qui est autant celle du personnage principal (endetté expulsé devenant l'homme de main de son bourreau) que celle du film tout entier (s'attaquer au système en appliquant les codes convenus du thriller social) est en définitive la seule originalité d'un récit sans surprise.
Au service d'un scénario au systématisme un peu usant (partagé entre la volonté de rendre compte du réel et celle de s'en extraire pour creuser les sources du mal), la mise en scène de Ramin Bahrani est plutôt efficace mais ne brille pas par son inventivité. Le recours aux mêmes procédés narratifs (succession de scènes identiques pour marquer la répétition des tâches, mise en relief un peu appuyée des conflits intérieurs du héros...), alourdissent une narration par ailleurs sans surprise.
Dominé par les interprétations justes et plutôt subtiles d'Andrew Garfield, Michael Shannon et Laura Dern, 99 homes n'en demeure pas moins un film rythmé et plutôt intéressant dans la manière dont il démêle l'écheveau du système immobilier américain. Sans doute est-ce aussi pour cela qu'il a obtenu le Grand Prix du dernier Festival de Deauville.