Je vais être très clair dès le début : j'ai détesté. Passons quand même d'abord sur ce que le film évite, sur le soulagement que j'en ai eu : 12 Years a slave n'est pas le film "abject" que j'ai redouté, tant dans sa mise en scène que dans son idée de fond. Il n'y a pas d'histoires de voyeurisme, de cynisme ou de travelling de Kapo là-dedans. Le problème est ailleurs, et il est beaucoup plus simple : le film est plat. D'une platitude absolument atterrantes, fondé sur une structure extrême linéaire, qui va de son point A à son point B, sans que rien ne ressorte, n'interpelle. Le film se regarde comme un film du dimanche soirs sur TF1 qu'on oublie 5 minutes après le dernier plan.
Au bout d'une heure de cette ennui véritable, sans colère aucune, j'ai tout de même essayé de voir ce que McQueen a essayé de faire, de raconter. D'abord, j'y ai vu la splendeur de la photographie, les champs, le soleil, tout ça. La lune rouge qui brille au loin pendant qu'une jeune esclave se fait violer. La beauté de l'horizon d'où ce détache cet esclave pendu à un arbre. Le film est beau - dans le sens esthétique du terme. McQueen a voulu faire une œuvre belle, au lieu de sortir quelque chose de tous ces corps souffrants et entassés les uns sur les autres. J'ai compris alors que ce que voulait dire le film n'était rien d'autre que ça : l'horreur peut avoir lieu dans les endroits les plus beaux. Son film ne dit que ça, nous la répète, nous le martèle, au cas où nous ne le savions pas. En me mettant à vraiment regarder ce film, je n'ai vu que ce bout de discours extrêmement limité, et sur deux heurs dix, on peut trouver ça long.
Puis, j'y ait vu la tentative de faire des "scènes", des blocs d'insistance et de rages, qui durent et qui marquent, et ce sans lésiner sur les tics de mise en scène de McQueen - démarche pompeuse déjà, mais soit. Sauf que la structure du film n'accroche rien, ne retient rien. Les scènes choquent, on se dit "mon dieu c'est horrible", car oui l'esclavage est horrible, merci tonton Steve de nous le redire ; et puis elle passent. Plan sur le soleil ou la lune, wonderful, et l'autre scène arrive, et c'est horrible aussi. Qui plus est lorsque tout ça, toute cette souffrance, se solde par un happy-end de circonstances, comme si McQueen, dans son ambition unique de "raconter l'esclavage", n'avait pas oser vraiment filmer un de ces milliards d'esclaves morts esclaves contre cet homme qui s'en est sorti. A la fin, on est ému, on pleure, et puis ces 12 ans et ces 2 heures, on les oublie très vite.
B-Lyndon
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le 13 févr. 2014

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B-Lyndon

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