Spoil*


Je n'ai pas pu m’empêcher de penser à "Django unchained" en sortant de la salle. Mise à part le principal atout de Tarantino, son humour, jouxtant plus habilement que le sentimentalisme de Mcqueen (une musique trop présente et un Brad Pitt 100% prétexte (Sérieux, il apparaît genre... 10 minutes?)), selon moi Tarantino a été surpassé sur tous les autres fronts.


Associant un scénario plus mature (évidemment... il s'agissait de romancer un vrai témoignage...) à une mise en scène contemplant la vérité des actes (contemplative par la douleur qu'on expose avec le corps nu et la chair des esclaves, puis par la beauté indécente et ensorcelante des décors), Mcqueen semble dire "Quentin, pendant que tu te bornes à orchestrer la délivrance de l'esclave au moyen de grosses scènes d'actions, je parlerais d'un autre aspect phénoménale : le corps meurtris de l'esclave" Ce sur quoi sa lente mise en scène nous expose la limite du soutenable (les plans les plus longs sont ceux des esclaves, en particulier Salomon (Salomon à demi pendu, Salomon les yeux pleins de larmes, Salomon fouettant son amie contre son gré...)) avant de rajouter "Tu vois, je peux faire du sensationnel tout en restant honnête"


Quitte à faire un film sur l'esclavage, autant admettre l'ignominie du thème. Je veux dire, ce n'est pas en glorifiant un personnage comme Django, en le parant d'un regard plus cow boy que son chapeau qu'on peut prétendre atteindre ma sensibilité. Mcqueen se simplifie la tache en posant une caméra indiscrète, un plan unique et profond d'une même blessure. C'est pour ça que j'aime ce réalisateur. Il sait exposer les cicatrices. Il ne fait pas semblant (il ne fait américainement pas semblant, n'abusons pas) comme certains filment qui se limitent à nous complaire. Je ne vais pas voir un film sur un sujet grave pour être dorloté. Je n'ai pas envie que la réalisation fasse abstraction de détails importants qui nous feraient mieux comprendre la part d'ombre et de lumière de l'être humain. Je ne fais pas l'apologie de la violence, au contraire. Je n'aime pas quand la violence mise en scène ne raconte rien de véridique, quand elle à pour seul but de choquer. Dés lors, je préfère qu'elle soit sous entendue, ou que sa mise en scène soit subtil.


Le pacte moral de 12 Years était de témoigner des tortures extrêmes qu'ont infligé des humains à d'autres au cours de notre histoire. Dans un soucis d'impartialité, Mcqueen mets le doigt sur la souffrance que vivaient la majorité des esclaves, quels que furent leurs privilèges ou la candeur de leur maître. Si Tarantino met en exergue le mépris (très Far west) de Django envers les esclavagistes, Mcqueen exprime bien mieux pourquoi (et le spectateur n'avait pas besoin de toute cette musique pour que ça l'émeut...) Le réel soucis de "Django unchained" et le réel atout de "12 yers of slave" étant la vulnérabilité crédible des personnages, l'esclavagiste hyper violent de Fassenberg surpasse de loin celui de Dicaprio et à même déclenché chez moi plus d'empathie que pour le personnage de Django. Pour cette raison, quoique plus violent, "12 years of slave" délivre un message d'espoir tangible : Vulnérabilité = "Humanité" = Espoir (l'importance du message d'espoir est mon 1er critère d'appréciation d'un film)


Mcqueen a l'air de clore fermement et américainement le clapet de tout le monde: "It will be the last movie about USA's slave, mother fucker".

Faraway-screen
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le 4 févr. 2014

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le 4 févr. 2014

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