Sur le papier, l'entreprise avait tout pour se transformer en purge daubée à but bassement mercantile. Reprendre les tubes du patron de l'électronique français en version symphonique ? Et pourquoi pas les Beatles en mode guinguette ?


Il fallait pourtant faire confiance aux artisans de ce projet qui avait tout pour mal se finir. Aux manettes, les arrangeurs Nic Raine et Gareth Williams réalisent dans l'ensemble du très bon boulot, et donnent un lustre nouveau à certains titres de Jarre qui semblaient n'attendre que l'orchestre symphonique de Prague pour, qui gagner une seconde jeunesse, qui révéler des qualités d'écriture cachées, qui prendre une ampleur insoupçonnable.
Pour s'en sortir, ils "trichent" parfois un peu, convoquant ici ou là une batterie, une guitare, une séquence de synthétiseur. Mais dans l'ensemble, le cahier des charges orchestral est respecté.


A retenir, donc :
- la suite "Chronologie" (parties 1, 2 et 3) qui ouvre magistralement le disque. On connaissait le potentiel emphatique de la partie 1, ici parfaitement exploitée, et l'écriture lyrique, quasi classique de la partie 3, à laquelle répond avec élégance l'ampleur de l'orchestre ; plus inattendue, l'électro énervée de la partie 2 devient une course-poursuite enthousiasmante en convoquant l'énergie de tous les pupitres.
- un "Equinoxe IV" très puissant, enrichi d'arpèges en arabesques du plus bel effet sur les répétitions du refrain à la fin.
- la deuxième suite du disque, "Révolution Industrielle", qui résonne avec force et conserve étrangement le côté industriel des morceaux, gagnant en chaleur là où le Roland D-50 rendait la version d'origine un peu trop froide et mécanique.
- "L'Emigrant" qui, pour les mêmes raisons, exploite tout son potentiel d'émotion et assume à plein régime son lyrisme.
- "Rendez-Vous 2", sans surprise.
- Et "Acropolis", morceau composé pour le concert d'Athènes en 2001, dont c'est ici le premier enregistrement studio, d'autant plus beau qu'il est dépourvu de la rythmique lourde qui accompagnait la première version.


Il y a aussi des approximations ou des ratages : "Oxygène 4", "Rendez-Vous 4"... ces morceaux n'étaient pas faits pour l'orchestre, à l'évidence ; "Souvenir de Chine", un poil trop mou ; "Chants Magnétiques 5", décidément dispensable ; "El Dorado", version trop cheap...
Mais l'ensemble s'avère aussi cohérent que surprenant, dans le meilleur sens du terme. Pas forcément à destination d'un non-initié, encore une fois. Mais pour les fans un tant soit peu curieux et ouverts d'esprit, une expérience qui éveille une vision neuve sur certains morceaux devenus anodins à force d'écoute dans leur version originale.

ElliottSyndrome
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le 21 févr. 2020

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