Damso est un artiste qui a eu un parcours pour le moins atypique. Il a fallu peu de temps après son explosion pour que tout le monde comprenne le potentiel que ce mec avait en lui. Il a tout de suite su imposer son univers dans Batterie faible, et il a avec Ipséité sorti un des projets les plus aboutis du rap français, mêlant textes incroyables, flow démentiel, charisme, et prises de risque. Il avait tout pour s'imposer comme la nouvelle référence du rap français. Et puis Lithopédion est sorti, où on pouvait déjà deviner une fracture entre le rappeur et son public. Toujours des prises de risque, un goût pour les expérimentations instrumentales, voir une destruction complète des frontières entre rap français et d'autres genres musicaux. Si l'album était plus confus, moins structuré, et moins rappé, on pouvait facilement deviner qu'un virage était entrepris.
QALF était donc attendu comme le messie, projet prévu de longue date, qui promettait un Damso "à l'ancienne", qui allait kicker sale, nwaar comme il savait le faire.
Sauf que... pas vraiment.
Une réédition plus tard, que retenir de ce projet ? 25 pistes. Et aucune cohérence dans la tracklist.
QALF Infinity est un passage de la télé noir et blanc à la télé couleur : la qualité des programmes n'a pas nécessairement évolué, mais toutes ces nuances de jaune, de bleu, et de rouge, offrent une diversité ultra intéressante. A la première écoute, c'est indigeste. Mais les mois passent, et on arrive pas à se sortir cette mélodie de la tête. Cette couleur est parfaitement illustrée par MOROSE, qui est peut-être le meilleur morceau de cette année. Riff de guitare, saxophone, voix mélodieuse, avec un mix incroyable...
Les productions sont d'une qualité exceptionnelles tout au long de l'album : OG, 2 DIAMANTS, PASSION (que j'adore pour son storytelling), COEUR EN MIETTES, 911...
Oui, QALF Infinity est décousu, Damso n'a plus grand chose à nous dire dans ses textes (à part le très émouvant DEUX TOILES DE MER), mais je pense qu'il doit se consommer comme un kiff, comme si on était en studio avec Dem's et qu'il posait sur des prods sortis des cartons.
Ne cherchez pas de points communs entre BXL ZOO, VANTABLACK et INTRO. Comme quand il balançait des sons (Oeveillé, J'avais juste envie d'écrire.), Damso a abandonné la cohérence musicale, pour y préférer l'expérimentation, et il faut le dire, dans certains cas l'excellence. Peu d'albums en 2021 peuvent se vanter d'être meilleur que celui-ci, musicalement parlant, dans le rap français. Alors oui, Damso ne sera pas le nouveau Duc. Il a décidé de prendre un autre chemin. Je pense qu'il faut s'attendre à ce qu'il laisse un peu le rap de côté, il a clairement envie d'explorer d'autres univers musicaux. Et il lui manque une certaine constance dans la qualité. Mais sa trajectoire reste intéressante à suivre, et ses morceaux font du bien à nos oreilles. Il ne nous reste plus qu'à attraper nos écouteurs, et à profiter de cette couleur musicale.