Il y a bien longtemps, il me semble l'été dernier (ce qui en années King Gizzard représente 5 ans), le groupe nous avait promis un projet yin yang : deux albums qui n'ont rien a voir l'un l'autre, mais qui seraient étroitement liés. On a déjà eu une idée similaire par le passé comme le diptyque de 2019 Fishing for Fishies/Infest the Rats' Nest. Le premier, délire boogie blues autour de conseils écologiques pour un monde meilleur. Le second, furie thrash metal où la Terre devenue inhabitable, le restant de l'humanité tente d'y trouver un nouvel espoir, et finissent par causer leur propre perte. Ainsi sort ce qui semble être la première moitié, PetroDragonic, même si le groupe semble avoir abandonné la communication sur ce point de vue. Ce qui me semble bien dommage, j'avais vraiment imaginé un délire à la Pokémon où les deux albums sortiraient en même temps et qu'il nous faudrait choisir et prendre parti de cette dualité.


Quoiqu'il en soit, voilà PetroDragonic Apocalypse; or, Dawn of Eternal Night: An Annihilation of Planet Earth and the Beginning of Merciless Damnation, ou pour faire plus simple PDA;o,DoEN:AAoPEatBoMD et rien que son apparence première est ultra clair sur ses intentions. L'album sera metal, il sera brûlot et brutal. Avec en prime un titre en exclusivité vinyle. (Je me permets de faire un aparté dessus pour exprimer ma déception sur cette décision. Je sais que King Gizzard a toujours tenté d'innover et de pousser les limites avec le format d'album : la boucle Nonagon Infinity qui ne fonctionne qu'en numérique, les ultra formatés Quarters! et Laminated Denim prenant tout son sens en vinyle, ou le faux double album K.G./L.W. mais là, rendre un élément culturel en contrepartie d'argent, ça ne leur ressemble pas. Même si on sait que dès que reçu un bon samaritain nous le rendra accessible à tous)


Donc l'album est metal, et n'importe qui connaissant un minimum le groupe se doit de faire la comparaison avec Infest the Rats' Nest, l'autre album thrash. Mais il y a une différence notable. ITRN n'avait (presque) que des titres très courts atteignant à peine les 4 minutes. C'était un album purement heavy, puisant son efficacité dans la puissance des riffs. PDA se veut plus complexe, et les morceaux dépassent (presque) tous les 5 minutes, la moitié tournant dans les 8-9. Et oui, PDA est un album de "prog" metal. Et oui, je mets le terme entre guillemet puisque j'estime que 90% du "prog" metal n'a rien de prog, le genre étant nommé ainsi souvent pour la seule complexité rythmique.


Car c'est un constat qui saute aux yeux. L'album se concentre davantage sur les rythmes, et délaissent volontairement la mélodie des riffs. Les exemples sont légions : Witchcraft et son refrain en 31/4 (ou 4+4+4+4+4+4+4+5/4), Flamthrower en 15/8 et son refrain en polyrythmes où ces gros bâtards s'amusent à décaler leur chant... La liste serait interminable et je suis sûr que j'en ai pas capté la moitié. Pourtant, on sait que le groupe est un grand amateur des mesures irrégulières, quitte à utiliser du 5/4 à peu près tout le temps. Mais là, ils ont repoussé leurs limites. En soi, King Gizzard nous fait du Tool (mais en bien), et reprend ce qui faisait la force de Polygondwanaland, le metal en plus.


Mais allier l'efficacité du metal et la complexité de la durée et du rythme, ça serait pas un contresens ? Un peu. Certains titres sont trop longs. Comme l'ouverture Motor Spirit, malgré la bonne idée de teaser des riffs que l'on croisera dans de futurs morceaux, se perd avec quelques parties inutiles, notamment le solo de batterie. Ou bien Converge qui finalement n'a pas grand chose à raconter, et se retrouve coincé entre d'autres titres bien meilleurs. Gila Monster évite la même sentence de justesse, par son aspect "single". En fait, le seul qui échappe à ce jugement c'est un Dragon impeccable, où les transitions sont franches et géniales (je cite pas de moments en particulier puisqu'ils représentent environ 9min44). Cet aspect est également marqué par la restriction instrumentale, comme pour Rats' Nest où la production s'était limité sur le trio Mackenzie/Walker/Cavs. Il en est de même ici, avec quelques petites variations, notamment sur la fin...


Et oui, si vous avez fait attention, Flamthrower contient cette partie finale où les guitares se font progressivement remplacer par des synthés. Ce choix artistique peut sembler anodin au premier abord, mais rappelez vous ce que j'écrivais au tout début. Il semblerait que le groupe n'ait pas oublié cette histoire de yin yang. Cela confirme mes spéculations : le prochain album risque fort d'être electro, voire techno. Il faut dire que le groupe avait partagé sur Instagram des photos de leur studio, avec des instruments typiques de ce genre (enfin, c'est des encore plus gros fans qui ont dit ça, moi je suis incapable d'analyser quoi que ce soit). Si pour l'instant on a que très peu d'information dessus (il me semble qu'ils avaient discrètement partagé une pochette très... étrange, mais impossible de retrouve quelconque trace), nul doute que très bientôt on aura du nouveau.

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le 20 juin 2023

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