Koi no Yokan par T_wallace
Deux ans et demi après un Diamond eyes décevant, marquant une panne d'inspiration et frappé du retrait de Chi Cheng suite à son accident de voiture, Deftones revient avec un album dans la même veine.
Osé, car les influences djent pataudes, les envolées quelque peu sophistiquée de Chino Moreno et l'apparat trop décousu de l'ensemble avaient laissé une impression mitigée aux fans, comme si le groupe de Sacramento avait atteint la fin d'un cycle à la sortie de l'exceptionnel Saturday night wrist, et s'apprétait à plonger dans le schéma classique de ces groupes en perte de vitesse qui sortent un album tous les deux ans sans se rendre compte qu'ils ne font plus que décliner le même motif sans aucune spontanéité, chanson après chanson.
En réalité, il aurait mieux valu voir Diamond eyes comme le début d'une nouvelle orientation pour le groupe, à laquelle personne n'était vraiment préparé.
Si Koy No Yokan (pas la moindre idée de ce que ça signifie) s'ouvre sur un morceau à oublier rapidement, parodie de néo-metal au riff évoquant furieusement du mauvais System of a down, les éléments qui font le plaisir de l'auditeur réapparaissent dès après, en forçant le trait sur les nouveautés perçues précédemment : mesures composées et/ou signatures rythmiques variées, son de guitare énorme avec accordage digne de Meshuggah, batterie survoltée, enrobage éléctro discret autant que subtil...
Surtout, le groupe semble avoir retrouvé le gout de prendre son temps et d'écrire des morceaux aboutis, là où certains titres du précédent album semblaient parfois tronqués (une seule chanson en dessous des 3'30, la seule dispensable de l'album), et livre un vrai album -denrée rare en ces 2010's-, au sens où on l'écoute de bout en bout sans se lasser, ni sans avoir l'impression d'avoir affaire à un groupe différent dès que les singles sont passés.
Certes, la voix de Chino Moreno est toujours noyée sous des hectolitres d'effets, dont ce delay parfois insupportable, certains plans de guitare ne s'embarrassent pas de subtilité, on sait que ça ne sera pas parfait en live, et plus que tout, jamais on ne retrouvera l'alchimie qui faisait de White Pony un album si sublime.
Mais ce ne sont là que des bagatelles au vu du travail accompli : la voix de Chino, versatile comme jamais, hérisse le poil comme au bon vieux temps, le crunch qui habille sa Gibson SG vient toujours contrebalancer délicieusement le son résolument metal de Carpenter, et l'énergie si dense qui a maintenu les cinq musiciens au sommet durant leur longue carrière est toujours présente.
L'album est sorti le 12 novembre en France, il était temps les gars : je n'avais pas encore mon album de l'année pour 2012.