Grin
7.9
Grin

Album de Coroner (1993)

Le Thrash est probablement le genre de Metal que j'écoute le moins. Je n'y trouve pas l'aspect planant et massif du Stoner et du Doom, ni la majesté du Black, ni la furie jouissive du Death. Mais une bonne discothèque est faite d'exception !

J'ai découvert Coroner un peu avant le confinement (brrr...), apprenant qu'il devait passer pas loin de chez moi. Bien sûr, le concert a été déplacé, mais je suis quand-même tombé amoureux d'un groupe. Et surtout d'un album en particulier.


Grin est le cinquième et dernier (actuellement) album du trio suisss Coroner. Pour ce qui ne connaissent pas le groupe, c'est du Thrash technique avec moultes soli, riffs, et des chansons sur les troubles mentaux et l'ésotérisme. Les quatre premiers albums sont relativement accessibles, surtout Punishment for Decadence et No More Color, rapides, jouissifs et chargés en passages techniques et mélodiques.

Ce cinquième disque en revanche, est probablement le plus difficile à aborder pour un néophyte. C'est un véritable tournant pour le trio, qui s'éloigne du Thrash classique pour aller vers des expérimentations plus groovy, flirtant avec les sonorités Indus.


Quand un groupe change radicalement ses sonorités, deux embranchements existent : soit c'est tout pourri, soit c'est génial. Et dans le cas présent, Coroner a réussi un coup de maître. En poussant la technique et les expérimentations à un stade élevé, ils nous ont offert ce que je considère comme le meilleur disque de Thrash aux côtés du Rust in Peace de Megadeth, sorti trois ans avant.

Et bien en quoi concerne ses fameuses expérimentations, me direz-vous ? Et bien, au fur et à mesure de mes années à écouter du Metal, j'ai remarqué que le Thrash était probablement le sous-genre dans lequel il y avait le moins de prise de risque. Depuis Exciter et les premiers albums de Slayer, c'est un genre qui est resté relativement inchangé. Il a pourtant ses propres sous-genres (Crossover, Groove, Tech) mais la racine reste cependant inchangée. Et là, on a trois Suisses qui arrivent au Morrisound Studios début '93, et qui nous pondent un album audacieux et complètement nouveau.


Effets électroniques, samples, didgeridoo, écho, chants féminins, tout ce qui pouvait servir à créer une ambiance novatrice a été utilisé. Sans oublier que Ron Royce (loué soit son crâne chauve), Tommy T. Baron et Marquis Marky sont des musiciens d'exceptions. Les riffs sont envoûtants, hypnotiques comme le vynil que vous verrez tourner sur votre platine. Les soli sont des envolées magistrales et complexes, les lignes de basse sonnent comme les ondulations d'un serpent (mais si, Serpent Moves !), et la batterie martèle des rythmes parfaits pour le headbang. Les morceaux ne sont pas spécialement rapides, ils durent en moyenne plus de cinq minutes, et sont d'avantages mélodiques ou massifs plutôt que rentre-dedans.

Avant Grin, il y a eu Mental Vortex qui a été salué par la critique pour son aspect technique. Mais le quatrième album paraît minable face à son successeur ! Le solo de deux minutes de Paralyzed, Mesmerized et le riff de la chanson éponyme balaient tout sur leur passage !


L'instru du disque installe une véritable ambiance, un sentiment d'oppression et d'angoisse qui piège l'auditeur dans un vortex de folie existentielle. Comment rester sain d'esprit quand la voix moqueuse de Ron Royce vous dit :


Love never crossed my way
Care, not even for myself
Peace means to reload a gun
Rest, I won't before I die

Car oui, cousin du Punk, le Thrash aime critiquer ce qui ne tourne pas rond en ce bas-monde. Mais il y a quelque chose de pire que la face visible de l'iceberg : ce qu'il y a sous l'eau. Le mal-être, la colère, la grangrène cérébrale, les conflits intérieurs (Internal Conflicts, vous l'avez ?).

Pour revenir sur le chant, il y a aussi quelque chose de différent. Les paroles ont tendance à être écrites et interprétées comme du rap, ou je ne sais pas quoi...Elles jouent beaucoup sur la répétition plutôt que sur les rimes...Encore une tentaive d'hypnose !


Don't wanna hear no tragedy
Don't wanna hear the things you see
Don't wanna hear no wedding bells
Don't wanna hear no dying dance
Don't wanna feel a warming breeze
Don't wanna feel you touching me
Don't wanna feel like I'm on trial
I wanna feel I know
Why do I hate you?
Why do I hate you?

Pour conclure, je ne peux que vous inviter à aller écouter cet album. Vraie merveille où se mêle Metal Indus, Thrash et sonorités expérimentales. Probablement l'album le plus poussé et travaillé du groupe, et ne vous inquiétez pas si vous êtes hypnotisé par ce son de guitare, c'est tout à fait normal.

Arthur-Dunwich
9
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le 17 févr. 2024

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Arthur Dunwich

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