Sheath
7.5
Sheath

Album de LFO (2003)

LFO est un parrain. Un parrain de ce qu’on appelait l'Intelligent Techno autrefois mais qui est devenu l’I.D.M. par la suite. Hébergé par Warp, auteur de deux disques qui ont provoqué chacun leur révolution, on peut qu’approuver le statut qu’ont su acquérir Mark Bell et Gez Varley.


Ces véritables artisans des machines ont fini par se faire discret après l’excellent Advance pourtant. Un syndrome finalement assez courant dans le monde de la techno, où s’éclipser en pleine heure de gloire (ou juste avant le déclin) est aussi traditionnel que de s’embrasser sous le gui le jour de Noël. Les raisons de cette disparition s’expliquent surtout par le départ de Gez Varley. Mark Bell préférera mettre en suspend le projet LFO pour jouer les producteurs chez Björk et Depeche Mode.
Mais notre Markounet en avait un peu assez de triturer des boutons pour les autres et le voilà désormais de retour avec le nom LFO, puisque tout seul cette fois-ci.


Revenir après quelques années (ce qui équivaut à plusieurs siècles dans le monde de l’électro) est toujours risqué. La mode est passée et on a de grandes chances de ne remporter aucun succès, que ce soit commercial ou critique.
Mais le cas de LFO est encore plus effrayant. Comment peut-on oser revenir sur le devant de la scène après avoir sorti deux albums qui ont, à chaque fois, redéfini le monde de la techno et annoncé les tendances de demain ?


Quand on découvre Sheath, le potentiel d’être déçu est élevé. Pour la première fois de sa carrière, Mark Bell ne se réinvente pas. Ce tonton de l’électro applique des recettes qu’il connait sur le bout des doigts avec un professionnalisme qui laisse pantois.
Beats imparables (« Freak »), nappes acides (« Mum-Man », « Sleepy Chicken ») ou éthérées (« Blown »). Mélodies oniriques, enfantines (« Moistly ») ou hystériques (« Mummy, I've Had An Accident... »)… LFO récite 10 ans d’électronique avec un savoir-faire impressionnant.


C’est bien là où se situe le problème avec Sheath, ce disque est tout sauf inspiré ou novateur. Ce qui est une raison suffisante pour le snober et le haïr.


Sauf qu’on ne peut pas, parce qu’il est très bon.


Comme un certain Rhythm and Stealth paru en 1999, Sheath ne cache pas son programme. La pochette de ce dernier invoque l’emblématique extraterrestre de Frequencies et on sait déjà à quoi on va avoir affaire. Une synthèse d’un talent déjà exposé, mais tellement bien appliqué qu’elle ne peut qu’emporter notre adhésion.


Certains titres jouant trop la carte de la nostalgie sont cependant à éviter. « Snot » avec ses sons rigolos voire débiles, typiques de l’acid house n’est pas très palpitant. L’ambient de « 'Premacy » évoque aussi les terres froides et planantes d’Advance, mais ne réussit jamais à nous embarquer dans l’autre monde comme ce dernier pouvait le faire. « Freak » est cependant l’exception qui confirme la règle. L’archétype du tube acid techno qui aurait pu (dû ?) faire un carnage sur les pistes de danse. Porté en plus par un clip formidable dans le pur style de Chris Cunningham (alors qu’il s’agit en réalité d’un certain Daniel Levi derrière la caméra… Non rien à voir avec celui des 10 commandements).


A l’image de son label, LFO n’innove plus mais sort un dernier disque de qualité avant de disparaitre dans les limbes… Car nous n’avons plus de nouvelles de Mark Bell (et encore moins de Gez Varley) depuis cet album.
Mais n’oubliez pas ce que j’avais dit : les groupes d’électro savent toujours s’arrêter à temps, toujours… Voilà une leçon que les groupes de rock devraient retenir.


Chronique consultable sur Forces Parallèles.

Seijitsu
7
Écrit par

Créée

le 18 sept. 2015

Critique lue 132 fois

Seijitsu

Écrit par

Critique lue 132 fois

Du même critique

Split
Seijitsu
9

Chef d’œuvre sous-estimé

Dès les premières notes de "Light From a Dead Star", on sent que quelque chose a changée. Fini la reverb maousse de Robin Guthrie, le son de Lush s'est grandement aéré et les chansons en deviennent...

le 22 juil. 2015

16 j'aime

Badmotorfinger
Seijitsu
10

Enfin maître du grunge

1991: The Year Punk Broke. Il serait surtout plus juste d’affirmer qu’il s’agit de l’explosion médiatique du rock alternatif Américain, voire du rock alternatif tout court. L’année de la découverte...

le 2 mars 2016

16 j'aime

1

Giant Steps
Seijitsu
9

Kaléidoscope musical

Qu'est-ce qui sauve un disque de l'oubli ? Sa qualité intrinsèque ou la progéniture qu'il engendrera ? S'il y avait une justice en ce bas monde, c'est la première caractéristique qu'on retiendrait en...

le 15 août 2015

14 j'aime