Split
7.7
Split

Album de Lush (1994)

Dès les premières notes de "Light From a Dead Star", on sent que quelque chose a changée. Fini la reverb maousse de Robin Guthrie, le son de Lush s'est grandement aéré et les chansons en deviennent plus directes par conséquent. Le groupe a eu la bonne idée de produire lui même son second album avec l'aide de Mike Hedgeset et le tout sera mixé par Alan Moulder, ce qui est un très bon choix.


Mais Split n'est pas un Spooky mieux produit, c'est un album supérieur à ce dernier et sur tous les points ! Puisqu'il est plus varié et possède de meilleures chansons.
Pourtant, Split fera un vrai four alors que Spooky s'était plutôt bien vendu à sa sortie. La raison ? Le snobisme des critiques avait fait son œuvre: le shoegaze était décidément une musique bien trop en décalage avec l'image que le rock est censé avoir. Pas assez glamour, ni assez trash pour séduire, alors que de l'autre côté de l'Atlantique, le succès du grunge n'était plus à démontrer.


Ce contexte explique beaucoup de choses dans l'histoire de Lush, notamment la suite de leur parcours, mais aussi la réussite de ce disque summum. Coincé entre le déclin du shoegaze et l'apogée de la britpop, Split pioche un peu partout et récupère beaucoup d'ingrédients à son compte. L'indie pop des années 80 avec "Kiss Chase" (dont Miki Berenyi et Emma Anderson étaient très friandes), des lignes de basses post-punk ("Undertow"), les traditionnelles guitares noisy et des mélodies très efficaces ("Hypocrite") qui feront les choux gras de groupes britpop comme Supergrass.


Cela rend les critiques des journalistes d'autant plus incompréhensibles. Parce qu'elles reprochaient à Lush de ressortir le même disque connoté à la Cocteau Twins alors qu'il s'agit en réalité de leur plus ambitieux ! Autre détail qui prouve leur surdité, la présence de deux monolithes dépassant les 7 minutes: "Desire Lines" et "Never-Never". La première est tellement lente qu'elle se rapproche du slowcore et la seconde possède une force émotionnelle rare (notamment dans les dernières minutes avec ses violons). Mais le sommet de l'album, c'est "Undertow". Leur meilleure chanson car la plus aboutie et la plus profonde. Les voix sont encore plus sidérantes que d'habitude (ce qui est un exploit à souligner) et la fin du morceau est à glacer le sang tellement il atteint des sommets de beauté...


Après s'être autant décarcassé pour sortir un album de ce calibre, Lush baissera les bras et fera ce qu'on attend de lui: un album léger et efficace. Mais il reste ce Split en héritage et cela est amplement suffisant pour constater que Lush n'était pas juste le dernier groupe à la mode du label 4AD. Il n'est rien d'autre que l'auteur d'un des meilleurs albums de rock féminin que je connaisse.


Chronique consultable sur Forces Parallèles.

Seijitsu
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleurs albums du shoegaze, Les meilleurs albums des années 1990 et Les meilleurs albums de dream pop

Créée

le 22 juil. 2015

Critique lue 592 fois

16 j'aime

Seijitsu

Écrit par

Critique lue 592 fois

16

D'autres avis sur Split

Split
IssyMediatheques
9

Trésors cachés d'Issy

Occupant les guitares, le chant et la composition, Miki Berenyi et Emma Anderson n’ont pas attendu les Spice Girls pour lancer le girl power. Leurs voix aériennes croisées sur des riffs tranchants...

le 30 mars 2020

Du même critique

Split
Seijitsu
9

Chef d’œuvre sous-estimé

Dès les premières notes de "Light From a Dead Star", on sent que quelque chose a changée. Fini la reverb maousse de Robin Guthrie, le son de Lush s'est grandement aéré et les chansons en deviennent...

le 22 juil. 2015

16 j'aime

Badmotorfinger
Seijitsu
10

Enfin maître du grunge

1991: The Year Punk Broke. Il serait surtout plus juste d’affirmer qu’il s’agit de l’explosion médiatique du rock alternatif Américain, voire du rock alternatif tout court. L’année de la découverte...

le 2 mars 2016

16 j'aime

1

Giant Steps
Seijitsu
9

Kaléidoscope musical

Qu'est-ce qui sauve un disque de l'oubli ? Sa qualité intrinsèque ou la progéniture qu'il engendrera ? S'il y avait une justice en ce bas monde, c'est la première caractéristique qu'on retiendrait en...

le 15 août 2015

14 j'aime