Comme un instantané de l'individualité artistique de Fatimah Warner

Tiny Desk Concert Noname

“Um, hello everybody. I’m Noname,” annonce doucement Fatimah Warner sous des applaudissements enthousiastes après la première chanson de son Tiny Desk Concert 2017 . “I’ve watched so many of these, so I’m like : Man, I just wanna be as good as T-Pain", glousse-t-elle avant de présenter gracieusement son groupe.

Noname est de Chicago, où sa poésie a attiré l'attention de Chance the Rapper, un autre interprète confessionnelle et à la pensée positive. Elle était l'invitée de sa mixtape 2013, Acid Rap, et de son très populaire album de 2016, Coloring Book - suffisamment de visibilité pour que beaucoup de gens prêtent attention à l'été 2016, à la mixtape Telefone de la rappeuse.
Depuis, elle a déménagé à Los Angeles, mais comme Chance, c'est une rappeuse rare qui fonctionne toujours totalement indépendante des labels et des sponsors, finançant ses propres enregistrements et vidéos.

Le titre Room 25 fait en partie allusion à la série de chambres d'hôtel qu'elle occupait lors de sa tournée pour Telefone.
La chambre d'hôtel, après en avoir vu suffisamment en peu de temps, devient une chose de monotonie et de changement presque imperceptible. Ces pièces sont plus ou moins identiques, à l'exception du nombre sur la porte.
C'est le sous-texte de 25 : la croissance personnelle est indiscernable à court terme - il faut une vision à long terme pour analyser tout développement substantiel. Les triomphes de Noname ont donc tendance à consister en de petites victoires au lieu de grandes victoires. Sur "Window", elle reconnaît l'ennui d'une vieille flamme: “Everything we was was empty/ Empty fucking, cussing, I know I’m your bitch/ But you’re my bitch too.” C'est un sentiment doux-amer qu'elle décrit, solidifié dans la ligne d'ouverture ironique « Me so happy now, me so Mississippi », mais c'est aussi une mesure de maturité pour parler d'une relation toxique, même si elle se déforme avec la dernière ligne de la chanson: “Everything is everything, just know that I love you.”

Une partie de l’ ambiance introspective de Room 25 vient du producteur Phoelix, avec qui elle a déjà collaboré sur Telefone. Ses rythmes sont nuancés, étonnants et parfois détendus. Sur des morceaux comme "Blaxploitation", son instrumental jazz endiablé grésille contre le flux vertigineux de Warner. "Regal" est une rêverie, un son somptueux. Dans Phoelix, on sent que Noname a trouvé un partenaire prêt à la pousser.

Ce qu'elle veut dire sur Room 25 est complexe: réflexions sur la communauté, la sensualité, la mortalité et l'autodétermination. "Prayer Song" plane avec des accords de piano électrique et des Chœurs doux; les paroles sont une vision kaléidoscopique et libre-associative de Los Angeles, touchant la luxure, la violence, la gentrification, la chirurgie plastique, la masculinité, la consommation ostentatoire et la religion. Dans "Blaxploitation", Noname rappe à toute vitesse sur le racisme systémique, les stéréotypes et la tension constante: “I’m struggling to simmer down/Maybe I’m an insomni-black.”
Elle contemple le deuil et sa propre mort sur des cordes apaisantes dans "Don't Forget About Me", et elle prie pour l'équilibre et l'estime de soi dans si beau "Regal". Sur des accords de guitare jazz et des drums délicieux, elle conte une histoire d'amour ratée dans "With You"

En 35 minutes, ROOM 25 est plus un grand EP qu'un album complet sur une auto-reflexion, ses 11 chansons nous laissent en vouloir plus. Mais la brièveté est l'un de ses plus grands atouts sur l'album; comme un instantané de l'individualité artistique de Fatimah Warner, Room 25 accomplit tout ce dont elle a besoin, lui permettant de dire ce qu'elle a à dire, ni plus ni moins.
Et même si elle aborde parfois le chagrin, nous entendons toujours le sourire de Noname, à chaque chanson

8/10