Si l'on devait s'amuser au petit jeu de deviner les ingrédients qui composent le cocktail Yellowjackets on y trouverait une bonne rasade de Lost , une louche de Souviens toi l'Eté Dernier, un petit peu du film Les Survivants , un soupçon du film Le Territoire des Loups et le tout largement arrosé de teen drama. La série crée par Ashley Lyle et Bart Nickerson ne pouvait donc prétendre à l'originalité que dans le savant dosage de ses éléments.
Yellowjackets nous raconte l'histoire d'un crash d'avion qui précipite toute une équipe féminine de soccer ainsi que leurs accompagnateurs dans une immense forêt perdue au fin fond de l'Ontario. Des années plus tard quelques survivantes reçoivent un mystérieux message d'un maître chanteur tandis qu'une journaliste tente de comprendre et percer le secret pour savoir comment certaines ont réellement survécus durant de longs mois coupées du monde.
Yellowjackets est donc une série qui s'articule sur plusieurs temporalité puisque l'on suit à la fois le récit de survie de ces adolescentes après ce crash d'avion mais aussi la résurgence au temps présent du secret entourant la survie de quatre personnages devenues adultes. La série s'égare même parfois dans une troisième temporalité avec quelques flashbacks pour éclairer le passé de certains personnages. Premier bon point pour Yellowjackets ces allers retours vers différentes époques sont parfaitement gérés, fluides et lisibles. Les événements se répondent, se complètent , ils ne viennent que très rarement empiéter les uns sur les autres ou se parasiter et globalement on se retrouve face à une série bien rythmée et dans laquelle on ne se retrouve jamais perdu au sein d'une narration pourtant morcelée. Je reprocherais juste un certain flou temporelle vis à vis du récit entourant le crash lui même tant il est difficile de savoir si cette première saison couvre quelques jours, semaines ou mois puisque le temps n'a visiblement pas trop d'impact physique et moral sur les personnages à l'écran. Yellowjackets propose un récit assez dense qui laisse entrevoir de nombreuses pistes possibles sans toutefois trop en révéler encore. On pense fatalement à des enjeux dramatique et horrifique autour du cannibalisme mais la série s'égare aussi vers la piste fantastique et la possibilité d'une histoire de secte. C'est à la fois tout le sel et les limites de l'écriture de ce type de séries consistant à ouvrir des pistes pour assurer de futures saisons tout en laissant les spectateurs dans l'expectative. espérons en tout cas que Ashley Lyle et Bart Nickerson savent exactement là ou ils vont et qu'il ne feront pas la ou pire les saisons de trop.
Yellowjackets s'appuie également sur un très bon casting avec des choix quasiment parfaits pour rendre crédible la double incarnation des personnages jeunes et adultes. Melany Lynskey / Sophie Nelisse sont parfaites dans le rôle de Shauna sorte de desperate housewives assez drôle tout comme le duo Tawy Cypress /Jasmin Savoy Brown dans celui de Taissa. L'analogie et le rapprochement est peut être un peu moins évident et immédiat entre Juliette Lewis et Sophie Thatcher dans le rôle de la rebelle écorchée Natalie mais rien de préjudiciable. En revanche le double rôle de Misty incarné à la fois par une formidable Christina Ricci et une tout aussi géniale Sammi Hanratty est tout bonnement fantastique tant les deux comédiennes se fondent à merveille dans le même personnage de psychopathe maladroit et bien trop souriant. Le personnage de Misty est d'ailleurs l'un des gros point fort de cette première saison de Yellowjackets. Le casting est complété par Ella Purnell qui s'en sort plutôt bien avec un personnage assez caricaturale de fille ultra populaire, Liv Hewson (Santa Clarita Diet) et la révélation Alexa Barajas qui devrait prendre de l'importance dans les futures saisons.
Yellowjackets propose un cocktail assez réussi d'humour, de drame et de tensions traversé de temps en temps quelques moments horrifiques bien sentis. On sent clairement que cette première saison pose ses enjeux et ses personnages et ménage ses révélations, mais elle offre aussi quelques très bon moments comme une séance de spiritisme dans le grenier d'une cabane paumé et surtout quelques jolis promesses pour l'avenir. Bien sûr il faudra passer outre quelques péripéties franchement tirées par les cheveux comme la confection d'une piste de décollage en pleine forêt par une fille qui passe son brevet de pilotage express en lisant un manuel ou une malheureuse la gueule dévorée par les loups et qui recousue à l'arrache se retrouve avec une magnifique cicatrice défigurant à peine son joli minois. Autre petit soucis inhérent à l'écriture de beaucoup de série on sent que le besoin de tenir dix épisodes, la perspective de saisons supplémentaires à venir condamne un peu Yellowjackets aux pleins et aux déliés, voir parfois un peu au remplissage.
Yellowjackets est une bonne petite série dont la première saison reste riche en promesses. Portée par un excellent casting dans lequel rayonne le duo Christina Ricci / Sammi Hanratty la série, si elle ne se perd pas à trop vouloir durer dans le temps, pourrait nous offrir encore de très bon moments.