True Blood
6.2
True Blood

Série HBO (2008)

Voir la série

True blood saison 1

Bien entendu, j'allais forcément être déçu, comme tout le monde, voulant dans un absolu un brin naïf retrouver dans cette série d'Alan Ball la profondeur et la finesse humaniste de Six Feet Under. Ça n'a pas loupé. La saison 1 de True Blood est sympathique mais ne suscite guère l'envie d'aller chercher la saison 2. Aussi mon commentaire se contente-t-il de critiquer cette seule saison, d'analyser ce qui m'a permis d'aller au bout sans grande difficulté, ainsi que ce qui m'a quelque peu irrité, au point de ne pas vouloir continuer le chemin.

Une série sur les vampires avait sur le papier quelque chose d'alléchant. Souvent dans les films, cette mythologie donne une matière critique faramineuse (ce qui fait son succès). Entre réflexions sur le corps, sur la société, sur les croyances, la raison, etc., les voies sont nombreuses et prometteuses pour qui aime à se triturer la cervelle à coups de symbolismes et métaphores en tout genre. Et par certains côtés, True blood parvient astucieusement à développer des thèmes intéressants, sur l'exclusion, le racisme, la morale, les jugements de valeur, l'ignorance, élaborant ainsi une vision politique plutôt sévère à l'égard de la société américaine. La religion, le fanatisme et le qu'en dira-t-on sont, parmi les nombreuses cibles, celles qui semblent les favorites pour les auteurs de la série.

Le problème vient sans doute que les outils de démonstration (personnages et trames narratives) sont, à mon sens, un peu trop systématiquement grossis jusqu'à la caricature. Ils sont rares les personnages à avoir un peu de jus de ciboulot, à se tenir dans un rayon de crédibilité raisonnable. Il faut toujours, à un moment donné, que les personnages se laissent aller à quelque débordement, ce qui les rend démesurément antipathique. Bien sûr que nul n'est parfait, que tout un chacun a droit à sa part d'ombre, mais le trait est ici toujours tracé avec une pesanteur excessive. Les personnages n'échappent que trop rarement à l'hystérie. On est toujours dans une tessiture trop élevée. Du même coup, beaucoup de personnages pataugent dans une forme d'incohérence qui, de fait, les rend soit peu crédibles (encore que beaucoup pourraient arguer que les incohérences polluent le monde réel), soit juste fatigants, voire insupportables. Je parle d'antipathie plus haut, mais certains davantage que d'autres suscitent plus ou moins rapidement ce genre de perception, que ce soit la mère de Tara (Adina Porter), Tara elle même (Rutina Wesley) ou Sookie (Anna Paquin) et je ne parle pas de Jason (Ryan Kwanten). Ça fait beaucoup trop de casse-couilles dans une seule saison pour pouvoir provoquer en moi le désir de les retrouver lors de la suivante. Le seul véritable héros qui pourrait m'inciter à y revenir serait Lafayette (Nelsan Ellis), le seul à avoir la tête sur les épaules et à ne pas créer cette espèce de lassitude.

Ce qui aurait pu me pousser à poursuivre, c'est à n'en pas douter la superbe prestation de la majeure partie de la distribution, mention spéciale pour Nelsan Ellis, Rutina Wesley, Ryan Kwanten, Adina Porter ou Kristin Bauer van Straten. Mais tout cela ne suffit pas à m'accrocher.

La façon dont la série utilise la sexualité pour raconter son histoire et l'évolution des personnages, le monde qui les entoure, les rapports fondamentalement bancals entre les individus est également une réjouissante surprise qui ne suffit pas à rendre la première saison addictive.

http://alligatographe.blogspot.fr/2013/04/true-blood-saison-season-1-alan-ball.html
-------------

Saison 2:

J'avais terminé la première saison sans enthousiasme particulier, surtout sans penser que je verrai la suite. Mais faut croire qu'avec le temps les petites imperfections scénaristiques se sont estompées dans mes souvenirs pour laisser place au plaisir tout bête que j'en avais tiré : l'humour et le mauvais genre assumé de la série.

Et je retrouve exactement les mêmes caractéristiques : cette écriture parfois manquant de subtilité, atténuant de fait les effets de surprise, mais également une joie contagieuse à se livrer sans rechigner au genre fantastique, horrifique, voire gore. "True Blood" n'est certainement pas une très grande série, mais elle prend soin à bien faire son travail de divertissement.

La finesse de l'écriture n'est pas toujours au rendez-vous. Toutefois, le sous-texte libéral est féroce et peut se siroter avec bonheur. Le racisme, le sexisme, les obscurantismes sectaires, religieux prennent de méchants coups de tatanes dans les gencives et c'est assez jubilatoire ce côté corrosif, cette mordante subversion, qu'elle soit abordée de manière sous-entendue ou qu'elle soit frontale. Parfois lors de la saison 2, on est nettement dans le sous-genre horrifique, avec un substrat politique brutalement mis en valeur, notamment avec le personnage joué par Ryan Kwanten.

Sorte de clown intellectuellement très limité, Jason Stackhouse devient de plus en plus attachant autant qu'il était déjà ridicule. Kwanten réussit parfaitement à allier la connerie de son personnage à sa part débordante d'infantilisme. Ses expressions benêtes donnent à son visage des airs de George W. Bush. D'aucuns pourraient dire que ce personnage essaie d'humaniser la bêtise des conservateurs. C'est pas impossible effectivement qu'on puisse y lire non pas une légitimation mais au moins une tentative de compréhension des mécanismes qui amènent des demeurés à voir le monde de manière simpliste en noir ou blanc, à entrer dans des mouvements politiques ou spirituels poubelles, du moins douteux.

Au cours de la deuxième saison, un personnage devient bigrement intéressant, c'est celui que joue Alexander Skarsgård. Eric est un vampire dont l’ambiguïté finit par le rendre intrigant et même charmant. D'abord juste un grand échalas monolithique, il laisse apparaître une chaleur et espérer des failles pour les saisons prochaines. En tout cas, il prend de la place en trouble-fête dans le couple principal.

Autre personnage qui amène une plus-value par rapport à la saison précédente : Jessica, est jouée par une actrice (Deborah Ann Woll) au visage fascinant, électrique. J'avoue être hypnotisé par ce regard bleu métal, en contraste avec le laiteux de sa peau. Sa relation avec l'effacé Hoyt (Jim Parrack) est aussi une belle promesse pour l'avenir. Tous deux forment un couple attachant sur lequel les scénarii prochains devraient produire un suspense efficace.

Finalement, avec ces trois éléments (Jason, Eric et Jessica), j'ai bien l'impression que la série a produit une lente mais sûre maturation par rapport à la première saison. Au détriment du couple tête d'affiche Sookie/Bill qui perd en intérêt selon moi. Anna Paquin (Sookie) est un peu trop sur le même registre et finit par être usante par moments. Le jeu de Stephen Moyer (Bill) n'a pas beaucoup d'envergure non plus (du moins sur cette saison 2). Pareil pour Sam Trammell (Sam) peu affriolant. Lors de la saison 1, j'avais beaucoup apprécié Rutina Wesley (Tara). Cette fois, je suis un peu déçu, mais soyons honnêtes, cette saison ne lui laisse guère d'ouverture pour bien jouer. Reste que la palme du jeu pourri revient très certainement à Mehcad Brooks (Eggs). Très mauvais! On comprend qu'il a été engagé pour le talent de ses tablettes de chocolat, parce que pour le jeu, c'est diablement frêle.

Donc, cette saison 2 me plait dans l'ensemble. Bien plus que la première. Divertissante, mouvementée, rigolote et flirtant avec les sous-genres du cinéma bis, elle fait beaucoup plus preuve de truculence, s'assume davantage que lors de la saison 1. Je m'en payerais bien une autre tranche, dans la même veine, faussement orgiaque, réellement comique et bouffonne.
Alligator
6
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Top 10 Séries

Créée

le 21 avr. 2013

Modifiée

le 2 juin 2014

Critique lue 410 fois

1 j'aime

Alligator

Écrit par

Critique lue 410 fois

1

D'autres avis sur True Blood

True Blood
Karrie
7

Cry, bitch!

Parmi la diarrhée médiatique réservée aux fascinantes créatures de la nuit que sont les vampires, on trouve beaucoup, beaucoup de merde (normal pour une diarrhée. *rires enregistrés*), dont la pierre...

le 25 sept. 2011

44 j'aime

6

True Blood
Godspeed_Ya_SoB
8

Popcorn 1er choix.

Alan Ball, c'est avant tout Six Feet Under, une série qui approche la perfection sous tous les angles. Et si t'es pas d'accord, c'est que t'as pas compris et c'est comme ça. Alors avec True Blood, on...

le 15 oct. 2010

40 j'aime

6

True Blood
real_folk_blues
2

True Daube

Résumons: 1- Une blondasse ingénue qui veut pas coucher qui finit quand même par coucher avec un mec qui pourrait être son arrière grand père. 2- Un vampire super ténébreux qui souffre d'être une...

le 11 avr. 2011

35 j'aime

11

Du même critique

The Handmaid's Tale : La Servante écarlate
Alligator
5

Critique de The Handmaid's Tale : La Servante écarlate par Alligator

Très excité par le sujet et intrigué par le succès aux Emmy Awards, j’avais hâte de découvrir cette série. Malheureusement, je suis très déçu par la mise en scène et par la scénarisation. Assez...

le 22 nov. 2017

54 j'aime

16

Holy Motors
Alligator
3

Critique de Holy Motors par Alligator

août 2012: "Holly motors fuck!", ai-je envie de dire en sortant de la salle. Curieux : quand j'en suis sorti j'ai trouvé la rue dans la pénombre, sans un seul lampadaire réconfortant, un peu comme...

le 20 avr. 2013

53 j'aime

16

Sharp Objects
Alligator
9

Critique de Sharp Objects par Alligator

En règle générale, les œuvres se nourrissant ou bâtissant toute leur démonstration sur le pathos, l’enlisement, la plainte gémissante des protagonistes me les brisent menues. Il faut un sacré talent...

le 4 sept. 2018

50 j'aime