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Ou l'art de rater une marche, se viander, et dire que tout va bien: c'était prévu...

Avant toute chose : je ne vais pas critiquer l'esthétique, c'est un choix artistique purement subjectif, et si il y a bien une chose que l'univers de Star Trek m'a appris, c'est de ne pas condamner quoique ce soit uniquement par déplaisir visuel ou par une forme de nostalgie mal placée.
Non ce qui m'a fait grincer les dents devant les épisodes de Discovery, ce sont les actes impardonnables de feignantises d'écriture, ou de scénario visiblement développé sur un coin de nappe de pizzeria sans vraiment y réfléchir.
Et pourtant, ça commençait bien !


Le pilote jetait des bases intéressante : les Klingons ne sont pas juste des brutes sanguinaire potentiel bad guys d'une série lambda américaine. Ils ont un art et une culture profondément ancrée vers le traditionalisme et cherchent à retrouver la gloriole des anciens jours. Pour ce faire, ils ravivent la flamme d'un nationalisme basée sur l'idée d'une certaine pureté, puis l'extrémisme fait le reste du boulot : même une main tendue devient une insulte menaçant la cohésion même du projet.


Un écho à nos actualités, une promesse d'épisodes qui exploiteraient ces djihadistes de l'espace, avec leurs bonnes et mauvaises raisons comme tout Star Trek qui se respecte l'aurait exploré, et c'est ce que le pilote nous promet. En parallèle, l'idée d'un personnage principal qui n'a pas le droit de mettre un pied sur la passerelle offrait la possibilité de vivre dans les entrailles d'un vaisseau de la fédération, auprès des petites mains qui font tourner un tel mastodonte dans l'espace, idée sympa, humain,un mélange de DS9 et de TNG... en somme, des promesses qui n'auront durées qu'une heure trente.


Puis les scénaristes ont décidés de faire table rase du pilote à l'aide d'un petit "6 mois plus tard". Le sous-titre qui à posteriori aurait dû être sous titré "oubliez ce que vous avez vu, ou cru voir, on recommence". Burnham a rapidement de nouveau accès à la passerelle. Le reste de l'équipage ne sont que des pantins muet sans autre existence que celle de remplisseur de sièges et de tapoteur de consoles high-tech. Et le coté djihad est abandonné pour le méchant Klingon random n°3 qui est méchant parce que vous avez vu, il tue ses propres hommes et qu'il veut être le chef suprême... Un écho hommage à Michael Bay et aux scénarios des derniers Transformers ? Ou à une pub Orangina ?


Mais soit. C'est un choix scénaristique : ce ne sera pas une série d'un vaisseau voguant paisiblement dans l'espace à la rencontre de race ET. Car ils sont en guerre, vous comprenez.


Guerre qu'on ne verra pas.


Guerre qu'on ne sentira à aucun moment. Juste des hologrammes type Star Wars qui nous répètent à l'envie comme pour se convaincre que la Fédération perd cette guerre invisible. Sauf qu'on ne ressent rien. Pas de focus sur un membre d'équipage qui aurait perdu une tante ou un cousin sur une colonie éloignée : non.


La guerre, c'est pourtant un sujet profond, qui peut être développé de tellement de manière pour explorer la psyché humaine, ses contradictions, sa bravoure ou son absence (oh que c'est tentant de faire de la pub pour mes bouquins !... mais non, je résisterai...).
Non. Rien de tout cela. Pas de mur couvert d'images aux noms des milliers de disparus. Burnham qui est jugée responsable n'a droit qu'à des regards noirs... pendant 45 minutes. La guerre, on la verra trois fois sur presque 6 heures de temps : Une colonie sauvée, un vaisseau détruit et une fête donnée en l'honneur des morts...


Si on nous avait montré à quel point la Fédération se faisait laminer par les Klingon, si on nous avait fait ressentir le mental sur les nerfs de l'équipage après 6 mois de guerre avec autre chose que des plans fixe sur les membres de la passerelle qui ont absolument Zéro lignes de dialogues et à peine le droit de grimacer à la caméra, on aurait pu sentir un enthousiasme certain à voir le Discovery bondir enfin pour sauver le cake.


Malheureusement, non. Au lieu de ça, les gaffes s'accumulent et les situations qui auraient pu être intéressante deviennent niaise ou plate. Comment fait-on pour rater un épisode de boucle temporelle ? Simple : on force la caméra à rester bloquer sur le personnage le moins intéressant de l'épisode, comme si le scénariste lui-même était bloqué dans ladite boucle : incapable de sortir de cette fixette sur Burnham, alors que les aventures de Stamet qui va vivre et revivre les mêmes 15 minutes ont sans doute été tellement plus passionnante. Imaginez ! On aurait pu découvrir l'équipage grâce aux répétitions, leur donner quelques lignes de dialogues pour, vous savez, les faire exister, rien qu'un peu... et nous faire sentir une certaine tension lors des prochains épisodes où tout le vaisseau est à risque...


Non. Au lieu de ça, nous avons le développement de la romance de Burnham. Romance qui sera résumée finalement par un "personnal log", avec la délicatesse d'une intro de film porno. Le summum du "j'ai la flemme de développer une histoire d'amour alors je vous la résume : c'est une fille, c'est un bel homme qui a une tronche de traître, un rôle de traître, et pue la trahison à 3 km (pardon, 3 épisodes) donc ils s'aiment (insérer ici bruit de succions). Ils font une mission ensemble, partagent 3 repas à la cantine et c'est bon, au prochain moment de faiblesse de la part de l'homme, elle lui roulera une gamelle, et une fois le péché accompli, l'homme se relèvera pour montrer son vrai visage (aah, Angel, tu as une descendance, finalement !...). "
En passant, à ma connaissance, le capitaine Lorca qui a vécu plus de chose intense avec le gus en question, avait plus de raison de tomber amoureux de lui que l'héroïne.


Et ce final du 9éme épisode débarque, enfonçant définitivement le clou :
Un vilain tellement approfondi, tellement développé que lors d'une confrontation finale : pas de tension, pas d'attente : lui et l'héroïne qui ne peut pas mourir ne se sont jamais vu, ne se sont jamais haï, bref : ce sont des ombres qui dansent sur un mur sans autre intérêt pour nous que d'apprécier la gracieuse chorégraphie de coup de pied sauté et de pirouette acrobatique.


Bref, Discovery ne découvre rien, ne réinvente rien, mais le fais très esthétiquement. C'est beau, relativement bien joué (pour le peu de jeu nécessaire entre une semi-vulcaine impassible, un alien (seule note Trekkienne de toute la série : son parcours de victime biologique au prédateur prêt à tout pour défendre un concept - encore un thème qui était intéressant, mais gâché car trop (con)centré à vouloir rester sur Burnham) et un capitaine psychotique occupé à se montrer aussi impassible qu'un vulcain 100% pur sang. En conclusion : Nanard, l'ultime frontière.


Edit du 02/02/2018 : Après les 4 derniers épisodes ... spoilers :


J'ai peur d'être aveuglé par ma déception précédente et de rester avec un filtre "vision négative" en les analysant. Mais pour le moment, mon ressenti est : de bonnes idées, mais maladroitement/pauvrement utilisées, faute d'une construction intelligente préalable.
Car enfin, on dé-scotche un tout petit peu de Burnham pour se focaliser sur Stamet. Mais comme ils ont raté le coche de mettre Stamet en avant lors de l'épisode de la boucle temporelle, ça tombe un peu à plat. Mais j'aime bien Stamet, alors (soupir) on s'accroche. Mais je décroche à nouveau rapidement car à de nombreux moment, je ne peux pas m'empêcher de tiquer sur ce qui aurait pu être génial mais qui est raté à cause de ces foutus scénaristes. Ben oui.
Comme mis à part cinq personnages, le reste de l'équipage sont d'obscurs inconnus (après plus de 7 h d'histoires quand même...) voir leur double maléfique se battre et mourir nous fait autant d'effet qu'une lampe qu'on éteint. C'est pourtant tout l’intérêt de visiter un univers Miroir : on peut s'amuser avec des personnages dont on connait très bien la psychologie, et les faire évoluer d'une manière radicalement opposé : c'est fun pour les acteurs, pour les spectateurs et rafraichissant pour tout le monde. Mais les acteurs ayant eu 0 ligne de dialogue en 10 épisodes, qui n'ont pas d'épaisseur et se retrouvent à faire... la même chose... disons que ce n'est pas excitant de les voir mourir en version méchante : on ne sait toujours pas plus qui ils sont.
Reste les tribulations de Burnham et Lorca, le retour de l'amusante Michelle Yeoh (je suis fan, elle joue surement mal, mais je suis trop biaisé pour juger honnêtement...Oui, du Kung fu dans Star Trek, venant d'elle, j'accepte, c'est dire...) qui sont sympas.... ou qui auraient pu l'être, avec encore une fois plus de montée en sauce, préparée en aval.
La (très bonne!) révélation de Lorca offre un très beau twist, mais n'est pas utilisé à son plein potentiel : Imaginez là en fin de saison, après des épisodes où l'équipage entier qui aurait eu un développement quelconque (où ils auraient pu dire à voix haute qu'ils détestaient les méthodes de Lorca) se mettent à lui vouer un respect indéfectible (il y avait l'opportunité, avec l'amiral qui voulait démettre le capitaine de ses fonctions...et sachant d'où venait Lorca, celui-ci aurait pu apprendre à son équipage à utiliser un peu ce coté sombre qu'il y avait en eux pour accomplir une mission... etc...) et tout ce beau monde se retrouve face à la vérité... Là oui, j'aurais ressenti le triple de ce que j'ai ressenti au moment où l'équipage l'apprend.
Bref, de supers idées, mais utilisées trop vite, limite bâclée comme pour boucher les trous en urgence sans trop réfléchir à l'utilisation à plus long terme (et plus intelligemment)... pour finalement se retrouver au point de départ : au mauvais endroit au mauvais moment...
Mais !
Mais, il ne faut pas cracher pour le plaisir de cracher... la série vient de mettre un coup dans le bon sens, même si les maladresses des précédents épisodes handicapent sérieusement les choses à mes yeux, il y a comme une déclaration finale qui affirme que la série va réellement commencer, tout comme la mission du Discovery. En gros j'ai encore de l'espoir pour la suite...

Kane_Banway
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le 21 nov. 2017

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Kane Banway

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