Somebody
5.8
Somebody

Drama Netflix (2022)

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Cette série est comme ma critique : trop longue !

Un scénario de cinéma ne fait pas forcément une bonne série. Oui, car le format est important, sinon crucial. Et nous en avons la preuve ici. Les plus acerbes affirmeront peut-être, après le visionnage de ce "Somebody", que ça aurait pu, tout aussi bien, tenir en un épisode de "Black Mirror".

Et cette série, qui par ailleurs ne manque pas d'intérêt, est clairement trop longue pour son propos. Ironiquement, l'un des personnages secondaires demandera à un autre, au milieu de l'épisode 5 (de mémoire) : "Qui est-tu, toi, au milieu de toute cette histoire ?" Et on a envie de lui répondre instinctivement "toi, tu es un élément de remplissage !" (et la suite de la série confirme cette impression qui s'étend à plusieurs autres perso qui même s'ils étaient retirés du canevas, l'histoire en resterait inchangée).

Si ce n'était l'inutilité de certains personnages ce ne serait pas le pire, malheureusement, la série présente bien d'autres défauts pour étirer inutilement son contenu un peu court et créer un climat de tension artificielle :

- des scènes de dialogues quasi muets, inutilement pesants avec d'interminables blancs dans les échanges qui ôtent tout naturel aux conversations des protagonistes (vrai pour presque tous les dialogues de la série mais particulièrement ceux impliquant Yun-O pour accentuer un aspect malaisant autour du personnage mais qui impatiente plus qu'autre chose),

- des longueurs appuyées par des effets de style dans de nombreuses scènes pour donner l'impression qu'elle ont un rôle clef dans le dénouement alors qu'elles ne servent qu’un maniérisme d'ambiance et de remplissage (les scènes de sexe de Kim Sum seule ou avec Yun-O, la rencontre entre Mok-Won et celle qui deviendra sa petite amie, la fuite de Gi-Eun après la scène de la piscine, la souricière que Yun-O tend à Gi-Eun dans le quartier en démolition, etc)

- l'opacité inutile et encombrante autour de situations ou de personnages qu'on devine dès le début random pour tenter de créer des fausses pistes qui ne prennent pas (Samantha la cocréatrice de l'appli, la gérante du snack et son compagnon, Mok-Won, etc)

- choix dangereux de 3 personnages féminins principaux ultra typées du type « licornes » (en générale on limite la présence de ce genre de perso à un par univers scénariste car sa sur-représentation affaibli le concept de vraisemblance) : une très jolie surdouée autiste asperger, une super flic de la criminelle girly en fauteuil roulant, une chamane douée canon et lesbienne. Ici, ça donne l'impression que les auteurs ont cherché la facilité pour caser des jolies filles à l'écran et se faciliter la narration en les rendant toutes ultra douées dans chacun de leur domaine : une programmeuse surdouée pour créer l'appli, une flic pour faire la chasse au tueur et une chamane pour apporter une touche de couleur locale...

- les personnages masculins sont assez rares et tous toxiques : les flics masculins qui ont toujours 3 longueurs de retards, le gérant de la salle de jeu qui finira lui aussi en taule, Yun-O qui est évidemment le perso toxique de la série, le compagnon de la gérante du snack qui s'avérera être un lâche aveugle à ce qui se passe autour de lui, etc.

- Les particularités de l'appli que crée l'héroïne, lorsqu'elle est encore lycéenne, au 1er épisode (un ChatBot qui sur-analyse les non dits, les désirs secrets et les hésitations de l'utilisateur) ne servent pas à l'application qui verra le jour quelques années plus tard et 'originalité de la création de Kim Sum ne servira jamais directement dans l'engrenage narratif du criminel (sinon, de façon anecdotique, chez elle, sur sa borne de jeu originel pendant 5mn dans l'épisode 6),

- Les 2 personnages principaux n'ont pas le traitement narratif mérité : vous apprendrez très peu de choses sur l'héroïne ou sur Yun-O. La fascination de Kim Sum pour Yun-O, l'élément centrale de la série, est traitée d'une manière si désincarnée et opaque qu'elle n'apporte pas à l'histoire le liant nécessaire pour les connecter ensemble. Les rétentions sur ce que sait réellement ou ce que fait concrètement et à quelle degré Kim Sum est impliquée dans les agissements de Yun-O resteront un mystère jusqu'à la dernière seconde, donnant l'impression agaçante que des faits importants sont occultés.

Mais ces défauts ne sont pas les pires dans cette série qui partait pourtant sur une thématique peu courue et qui aurait pu virer en un "Bonnie and Clyde" sanglant et passionné. L’aspect le plus rébarbatif est qu'au final l'histoire dans son montage, la répartition des scènes et la distillation des informations est constamment laborieuse, embrouillée et maladroite, au point que les auteurs eux-mêmes ne semblent pas avoir les réponses aux questions que leur dernier épisode laisse en suspens.

Mais après avoir énoncé tous les défauts d'écriture, il faut reconnaître que la réalisation ne démérite pas complètement et qu'il y a quelques jolies plans (superposition de visages dans le reflet d'une vitre, quelques plans vertigineux dans le silo à grains, des atmosphères étouffantes plutôt réussies dans les ruelles du quartier en démolition, etc). La bande son est parfois intéressante et distille une ambiance classieuse et crée quelques contrastes intéressants avec les images. Les décors blancs et froids ne sont pas intéressants, mais le travail de lumière apporte quelques jolies perspectives de profondeurs dans les scènes de semi-obscurité. Le casting est plutôt bien choisi dans l'ensemble (Yun-O et MokWon en particulier) et les prestations des acteurs ne manquent pas de justesse. C'est certainement ce qui m'a permis d'aller au bout.

Car, vous l'aurez compris, ce n'est pas le scénario, les dialogues ou le choix des enchaînements de séquences volontairement nébuleux qui m'ont convaincu. Et ce n'est certainement pas mon avis, non plus, qui vous convaincra de consacrer 8h de votre temps à cette série qui s'étire beaucoup trop.

Comme moi, d'ailleurs, qui vous fais perdre un peu de ce précieux temps, avec cet avis bien trop long... ou presque

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le 28 nov. 2022

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