La collocation du bonheur !
Si vous avez promis à votre grand-mère de tondre la pelouse ou à votre petit(e)-ami(e) d'aller une semaine en vacances, ne lisez aucune critique, passez votre chemin et évitez à tout prix de commencer Sherlock. Pourquoi ?!
Tout simplement car cette série, au nombre de 3 saisons- 9 épisodes (1h30) est totalement addictive. Si d'ailleurs ce format peut parfois poser des problèmes, notamment dans la vitesse d'exécution des scènes mettant, un tant soit peu de côté les sensations et sentiments des personnages, il permet de fournir de véritables films, soignés et harmonieux.
Steven Moffat et Mark Gatiss, deux compères déjà remarqués chez Doctor Who et dont la réputation n'est plus à faire se sont lancés un pari fou: exhumer du XIXème siècle un classique de la littérature britannique et le transporter, 123 ans plus tard, dans un Londres hyperactif.
Amusante sensation que de voir apparaître à l’écran, un Sherlock hyperconnecté à son smartphone, avide d’SMS et dont le colloc n’est autre que John Watson, médecin de guerre racontant ses déboires non sur un carnet, mais sur un blog… Ô chère technologie ! Cependant, il ne perd en rien son sens de la déduction incroyable mêlé à une intelligence exacerbée, Sherlock Holmes est avant tout un anti-héros volontairement sociopathe qui semble s'adapter parfaitement au XXIème siècle.
De plus, l'âme qu'a octroyée Sir Arthur Conan Doyle à son bébé est toujours bien présente. Sous les traits de Benedict Cumberbatch, grande asperge au teint de porcelaine et accessoirement un des meilleurs acteurs britanniques de sa génération, le Sherlock de 2010 n'a rien à envier à son ancêtre. Grâce à une interprétation couronnée de succès, Cumberbatch s'approprie un rôle taillé sur mesure. Parfois hautain et froid, parfois drôle et loufoque, rien n'est mis de côté afin de livrer une interprétation magistrale, bien au dessus des autres Sherlock (oui je parle de vous Robert Downey Jr et Jonny Lee Miller!!). Comparses à la ville comme à l'écran, Martin Freeman incarne avec tout autant de brio le docteur John Watson. Dans un rôle qui se voudrait en recul pour laisser place à l'omniprésent Cumberbatch, Freeman ramène au premier plan un personnage autrefois en retrait. Drôle et surprenant, le duo fonctionne une fois de plus à merveille et semble être en bonne partie responsable du succès de la série. Mais, si il y a bien un personnage qui mérite une attention toute particulière, c'est Jim Moriarty. Horripilant psychopathe et rival de Holmes, Andrew Scott porte le costume de cet admirateur diabolique avec une aisance jubilatoire. Au final le supposé duo finit en un trio explosif dont l'épisode 3 de la saison 2 rend hommage.
Si le casting est à mon goût d'une grande harmonie, la réalisation de chaque épisode est tout autant jouissive. De part sa luminosité, son ambiance automnale et ses plans asymétriques permettant aux spectateurs de ne pas rester figés sur un personnage précis, la série nous plonge totalement dans son antre.
Même s'il est difficile de donner des défauts, il en existe quelques uns, notamment ce format entre le film et la série. 1h30 d'épisode semble interminable, pourtant l'histoire fuse, mettant de côté les émotions que l'on aimerait ressentir. À peine le temps de respirer au 221B Baker Street que nous voilà repartis à l'autre bout de Londres... À la longue, c'est épuisant ! Ce minuscule petit défaut se fait ressentir lors de l'épisode 2 de la saison 1 où l'on décroche assez facilement du script bien qu'on reste pour les beaux yeux et l'humour pince-sans-rire de Sherlock Holmes.
Le jeu en vaut la chandelle car si le pilote est extraordinaire, le final de la saison 1 laisse entrevoir une suite tout à fait délectable. Et c'est peu dire car l'arrivée de la saison 2 répond à toutes les attentes. Loin de vouloir spoiler une telle série, l'apogée arrive lors de l'épisode "The Reichenbach Fall" où aucun adjectif ne peut exprimer ce qu'il se passe. Tour de passe-passe incroyable, on se fait balader durant 1h30 telle une marionnette, pour finir estomaqué et bouche ouverte durant les 15 dernières minutes. Un final grandiose qui s'ouvre sur une saison 3 tout aussi consistante.
En bref, Sherlock sauce anglaise est l'un des meilleurs polars actuels, rempli de qualités. Dans un Londres où il fait bon vivre, on s'attache aux personnages à une vitesse effarante. Rythmée et élevée par le talent de ses acteurs, la série Sherlock offre bien plus qu'on ne peut imaginer. En attendant la saison 4 qui devrait pointer le bout de son nez en janvier 2015, il ne reste plus qu'à espérer une nouvelle cuvée tout aussi délicate que les précédentes. En d'autres termes, affaire à suivre...