Roseanne
6
Roseanne

Série ABC (1988)

A la fin des années 1980, on aperçoit un renouvellement des séries américaines, les prémisses de révolutions qui se feront sentir quelques années plus tard avec une chaîne comme HBO puis d'autres. Twin Peaks met de l'étrangeté dans ce qui apparaît alors comme une enquête policière (qui a tué Laura Palmer ?), NYPD Blues rend ses héros de commissariat fragiles, Seinfield quitte la cellule familiale prisée des sitcoms pour nous parler de la vie de trentenaire. Roseanne, elle, reprend ce foyer, mais le dynamite par ses personnages de la classe ouvrière et hauts en couleurs.


Roseanne est une création de Matt Williams, appuyée sur Roseanne Barr, l’héroïne principale. Le personnage est une mère de trois enfants, elle partage l'affiche avec son mari, joué par le formidable John Goodman. Roseanne travaille dans une usine de produits plastiques, lui est auto-entrepreneur. Ce sont des américains typiques, qui vivent dans une petite banlieue de Lanford, dans l'Illinois. Ce pourrait être le cadre de la célébration familiale, de cette ode au foyer américain.


Mais la série se distingue par le caractère fort de chacun. Roseanne est une machine à sarcasmes, toujours prompte à se moquer d'un tel, de mettre en dérision les demandes de ses enfants. Dan n'est pas en reste, mais il est aussi le père de famille avec ses petits travers, qu'il s'agisse de ses amis ou des tâches ménagères plus ou moins faites à reculons. Les enfants se chamaillent mais la personnalité de chacun est marquée entre Becky, la grande, qui veut grandir trop vite, Darlène, le garçon manqué, la râleuse, ou DJ, le petit dernier, le petit rapporteur.


Le premier contact est difficile, car il faut prendre en compte le ton particulier, mais toutes les sitcoms ont besoin d'épisodes avant de s'installer. D'abord, on se demande ce qu'est cette famille, qui semble alors très désunie. Mais pourtant c'est comme ça qu'elle fonctionne, et les épisodes viendront le prouver, il y a de l'amour, mais il n'est pas asséné de manière naïve. Un passage sur le divorce d'une connaissance viendra faire réfléchir Roseanne et Dan sur leur couple. Une péripétie survenue à leur enfant les rapprochera d'autant plus. On comprend alors que les sarcasmes ne servent pas qu'à moquer, mais qu'il y a de l'affection derrière, dissimulé pudiquement derrière ces piques et répliques. Il y a aussi une certaine modernité, à montrer ce qu'est vraiment une famille ou être une femme, en évoquant certains sujets tels que les premières règles de Darlène.


Le premier contact est difficile aussi car la série garde une certaine manière de faire la télévision héritée de décennies de tournages sans recherches esthétiques. Que ce soit dans les musiques jazzy, les interscènes à base de photographies ou de manière plus générale la manière de présenter l’action, de grandes scènes ouvertes pour se montrer devant le public. Si le ton est moderne, la réalisation reste dans les clous plantés par d'autres. Mais ce ne serait pas rendre hommage à la série que de s'arrêter à quoi elle ressemble, au lieu de ce qu'elle propose.


Série assez connue aux Etats-Unis, elle n'arrivera pas à convaincre par chez nous. Peut-être parce qu'elle n'avait pas le charme classique et lénifiant de séries comme Madame est servie, Arnold et Willie ou Une famille ordinaire. Elle nous montre une famille américaine banale, deux ouvriers tentant de concilier leur vie professionnelle et leurs enfants, avec une gouaille peut-être jugée trop vulgaire. Les dernières saisons resteront inédites sur les télévisions françaises, et l'édition en DVD s'arrêtera en cours de chemin.


Preuve de son importance chez nos voisins américains, 20 ans après (!) une nouvelle saison fut tournée avec les acteurs originaux mais le renouvellement fut annulé après des vilains propos de Roseanne Barr.

SimplySmackkk
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Défi 365 critiques en 2019 (Séries)

Créée

le 9 nov. 2019

Critique lue 291 fois

7 j'aime

5 commentaires

SimplySmackkk

Écrit par

Critique lue 291 fois

7
5

D'autres avis sur Roseanne

Roseanne
plezirdezie
5

Roseanne

Roseanne est une prolo qui rend hommage aux prolos (son histoire est dingo, Roseanne s’est mise à faire du stand-up tardivement, alors qu’elle était mariée avec des gamins, avant d’avoir sa propre...

le 9 juil. 2016

Du même critique

Calmos
SimplySmackkk
8

Calmos x Bertrand Blier

La Culture est belle car tentaculaire. Elle nous permet de rebondir d’oeuvre en oeuvre. Il y a des liens partout. On peut découvrir un cinéaste en partant d’autre chose qu’un film. Je ne connaissais...

le 2 avr. 2020

49 j'aime

13

Scott Pilgrim
SimplySmackkk
8

We are Sex Bob-Omb and we are here to make you think about death and get sad and stuff!

Le film adaptant le comic-book culte de Brian aura pris son temps avant d'arriver en France, quatre mois après sa sortie aux Etats-Unis tandis que le Blu-Ray est déjà sur les rayons. Pourquoi tant de...

le 5 janv. 2011

44 j'aime

12

The King's Man - Première Mission
SimplySmackkk
7

Kingsman : Le Commencement, retour heureux

En 2015, adaptant le comic-book de Mark Millar, Matthew Vaughn signe avec le premier KingsMan: Services secrets une belle réussite, mêlant une certaine élégance anglaise infusée dans un film aux...

le 30 déc. 2021

39 j'aime

12